Santé, le grand fiasco – Véronique Vasseur et Clémence Thévenot
Cet ouvrage signé Véronique Vasseur, médecin à l’hôpital Saint-Antoine à Paris (souvenez-vous de Médecin-chef à la prison de la Santé) et Clémence Thévenot, journaliste, dresse un état des lieux sidérant de la santé publique aujourd’hui en France. Le beau modèle de la sécurité sociale créé en 1946 ne peut plus perdurer et ce n’est pas une énième petite réforme qui changera les choses en profondeur. Quand nous réveillerons-nous et accepterons-nous d’y réfléchir et d’en débattre ?
L’ouvrage passe en revue tous les dysfonctionnements, gaspillages, exemples consternants de gâchis monumentaux, consumérisme outrancier (« je cotise j’y ai droit »), mains lourdes des praticiens, lobbying des laboratoires pharmaceutiques acoquinés avec l’État, scandale du Mediator, etc. En soi vous n’apprendrez pas grand-chose de neuf pour peu que vous suiviez l’actualité (et que vous habitiez un désert médical comme moi où le délai d’obtention d’un rendez-vous chez un ophtalmo est aujourd’hui de 12 mois, 6 mois chez un dermato, impossible chez un gynéco (ne prennent plus de nouveaux patients) et que vous pourriez prendre des cours de roumain en allant chez le généraliste), d’autant que les bonnes feuilles de l’ouvrage avaient été publiées dans le Point au moment de sa sortie, mais l’accumulation des situations décrites (tristement réelles) ne peut que faire prendre conscience du pessimisme de l’avenir, et du changement colossal qu’il faudrait mettre sur les rails. Alors pourquoi on ne change rien, à part dérembourser de plus en plus de produits sans que les économies réalisées, de minuscules gouttes d’eau, parviennent à combler le gigantesque trou ? Parce que ce serait impopulaire. Et que lorsque l’on veut être élu, on ne peut pas se permettre d’être impopulaire. Et parce que tout le monde devrait se remettre en questions, élus, soignants, mais aussi malades « consommateurs » qui ont remplacé la notion de santé par les notions de bien-être et de confort.
L’ouvrage est très facile à lire, à la limite du langage parlé parfois, pas de verbiage alambiqué, c’est simple et direct. Dix grandes parties (ah, la CMU, l’AME, l’ALD, leurs contradictions et leurs aberrations, tout un poème !, les fraudes – de toutes parts, etc.) qui offrent chacune une introduction simple, et deux ou trois chapitres de développement.
J’hésite souvent à parler des docs que je lis, parce qu’il s’agit souvent d’un choix très personnel mais celui-ci nous concerne tous… Salutaire, mais vain ?
p. 35 : « Mais le gouvernement continue d’éviter les réformes aux allures de suicide électoral. La prudence des élus est responsable de la lente dégradation qui ronge notre système. »
Flammarion document, septembre 2013, 306 pages, prix : 19 €
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