Seul le grenadier – Sinan Antoon
Traduit de l’arabe (Irak) par Leyla Mansour

A Bagdad, Jawad apprend le métier séculaire de son père, qui consiste à laver les morts dans la tradition chiite, avant leur ensevelissement. Mais en parallèle il se prend de passion pour l’art, la sculpture notamment, et rêve d’en faire son métier.
Roman d’apprentissage qui éclaire à la fois sur un parcours familial traditionnel et la réalité historique et politique d’un pays traversé par les guerres, Jawad ne sortira pas indemne de ce chemin, et sacrifiera bien des idéaux. Mais pouvait-il en être autrement ?
Une belle narration, un personnage attachant, j’ai beaucoup aimé cette incursion dans la littérature irakienne que je ne connais pas du tout (et dont on entend peu parler) !
Extrait p. 117 : « La salle était noire comme une tombe, seule une faible lueur filtrait à travers la fenêtre. Je suis sorti dans le jardin et me suis accroupi devant le grenadier que mon père aimait beaucoup. Il avait bu les eaux de la mort des décennies durant et le voilà près de boire l’eau s’écoulant de son corps. Nous étions complètement étrangers l’un à l’autre. C’est seulement maintenant que je m’en aperçois. Les fleurs écarlates du grenadier commençaient à s’épanouir. Petit, j’en mangeais les fruits goulûment, quand mon père les cueillait et les rapportait à la maison. Mais je n’y avais plus touché dès que j’avais compris comment cet arbre se nourrissait. J’ai entendu le déversement de l’eau à l’intérieur. Quelques secondes plus tard, je l’ai vue apparaître dans la rigole qui la conduisait depuis la salle jusqu’au pied de l’arbre. »
Actes Sud, février 2017, 315 pages, prix : 22 €, ISBN : 978-2-330-05795-4

Crédit photo couverture : © l’arbre, Béatrice Boissegur / coll. privée © Béatrice Boissegur / Bridgeman Images / éd. Actes Sud