Alzheimer mon amour - Cécile Huguenin
Ce livre est le récit intime et personnel de Cécile Huguenin, qui a connu cette dure et cruelle épreuve d’accompagner son mari Daniel atteint d’une forme aggravée de la maladie d’Alzheimer. Elle retrace leur parcours, sa lutte, sa présence indéfectible, sa force combattive, et sa vision des soignants rencontrés.
L’écriture est plaisante et soignée, travaillée, entrecoupée des poèmes de son mari. C’est une histoire personnelle qui dès lors n’appelle pas la critique. Toutefois je me suis fait la même réflexion tout au long du livre : j’ai souvent pensé au récit de Marie-Dominique Arrighi sur sa récidive de cancer du sein, avec en tête ce dont elle s’excusait presque constamment : la chance d’avoir une aisance financière et intellectuelle (elle était journaliste à Libé), de pouvoir faire face et questionner, d’avoir les moyens et l’audace de le faire. Mais quid de tous les autres, qui n’ont pas ces ressources, que ce soit l’aisance de communication, la ténacité à questionner et obtenir des réponses, et tous les frais financiers collatéraux … Cécile Huguenin a tous ces moyens, mais n’en fait jamais la réflexion : j’ai trouvé presque indécent le chapitre à Madagascar, où certes elle se défend de faire vivre là-bas quelques familles qu’elle a embauchées pour se faire aider, les passe-droits, cette aisance financière un peu trop arrogante. Bien sûr sa conduite n’est dictée que par son amour pour son mari et sa lutte féroce pour l’entourer au mieux, mais cela m’a gênée, car pour une personne qui le peut, combien d’autres ne le peuvent pas, et se retrouvent dans le dénuement le plus total ?
De même la dernière partie montre l’endroit idéal pour accompagner la fin de vie des malades, où humanité et respect sont les valeurs défendues. Puisse ce chapitre faire réfléchir et bouger les décisions économico-politiques de santé publique, on peut rêver, ou espérer. Mais ce n’est pas encore une généralité.
Aussi de ce livre plus que le témoignage « Alzheimer » je préfère garder deux choses : c’est d’abord et avant tout pour moi le récit d’une très belle histoire d’amour, fidèle et indéfectible, jusqu’au bout. Ce que je retiens également c’est un détour de la dernière partie qui dit simplement l’importance du respect de la personne : continuer toujours et encore à s’adresser au malade et à le regarder, plutôt que comme trop souvent, s’adresser à son accompagnant, en niant tout simplement la présence de l’autre pourtant vivant.
Si ce livre peut apporter un témoignage d’espoir aux familles tristement concernées (et c’est d’une actualité croissante, on le sait bien), non pas d’espoir de guérison, mais simplement de respect et d’humanité, et enfin d’apaisement, c’est déjà une très bonne chose.
Ed. Héloïse d’Ormesson, juin 2011, 124 pages, prix : 14 €
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Crédit photo couverture : © Emiliano Ponzi / Magnet Reps et éd. EHO