Les jardins d'Hélène

Santé, le grand fiasco – Véronique Vasseur et Clémence Thévenot

9 Décembre 2013, 08:13am

Publié par Laure

Cet ouvrage signé Véronique Vasseur, médecin à l’hôpital Saint-Antoine à Paris (souvenez-vous de Médecin-chef à la prison de la Santé) et Clémence Thévenot, journaliste, dresse un état des lieux sidérant de la santé publique aujourd’hui en France. Le beau modèle de la sécurité sociale créé en 1946 ne peut plus perdurer et ce n’est pas une énième petite réforme qui changera les choses en profondeur. Quand nous réveillerons-nous et accepterons-nous d’y réfléchir et d’en débattre ?

 

L’ouvrage passe en revue tous les dysfonctionnements, gaspillages, exemples consternants de gâchis monumentaux, consumérisme outrancier (« je cotise j’y ai droit »), mains lourdes des praticiens, lobbying des laboratoires pharmaceutiques acoquinés avec l’État, scandale du Mediator, etc. En soi vous n’apprendrez pas grand-chose de neuf pour peu que vous suiviez l’actualité (et que vous habitiez un désert médical comme moi où le délai d’obtention d’un rendez-vous chez un ophtalmo est aujourd’hui de 12 mois, 6 mois chez un dermato, impossible chez un gynéco (ne prennent plus de nouveaux patients) et que vous pourriez prendre des cours de roumain en allant chez le généraliste), d’autant que les bonnes feuilles de l’ouvrage avaient été publiées dans le Point au moment de sa sortie, mais l’accumulation des situations décrites (tristement réelles) ne peut que faire prendre conscience du pessimisme de l’avenir, et du changement colossal qu’il faudrait mettre sur les rails. Alors pourquoi on ne change rien, à part dérembourser de plus en plus de produits sans que les économies réalisées, de minuscules gouttes d’eau, parviennent à combler le gigantesque trou ? Parce que ce serait impopulaire. Et que lorsque l’on veut être élu, on ne peut pas se permettre d’être impopulaire. Et parce que tout le monde devrait se remettre en questions, élus, soignants, mais aussi malades « consommateurs » qui ont remplacé la notion de santé par les notions de bien-être et de confort.

L’ouvrage est très facile à lire, à la limite du langage parlé parfois, pas de verbiage alambiqué, c’est simple et direct. Dix grandes parties (ah, la CMU, l’AME, l’ALD, leurs contradictions et leurs aberrations, tout un poème !, les fraudes – de toutes parts, etc.) qui offrent chacune une introduction simple, et deux ou trois chapitres de développement.

J’hésite souvent à parler des docs que je lis, parce qu’il s’agit souvent d’un choix très personnel mais celui-ci nous concerne tous… Salutaire, mais vain ?

 

p. 35 : « Mais le gouvernement continue d’éviter les réformes aux allures de suicide électoral. La prudence des élus est responsable de la lente dégradation qui ronge notre système. »

 

Flammarion document, septembre 2013, 306 pages, prix : 19 €

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Crédit photo couverture : © Flammarion

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A
Un livre que je ne lirai pas: avoir entendu Mme Vasseur se vanter de ne pas prescrire d'anti-inflammatoire à des patients souffrant du dos mais leur prescrire des exercices de gymnastique m'a révoltée.
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L
nous sommes d'accord alors ;-)
A
Je précise tout de suite que je ne suis pas une accro aux médicaments. Notre posture, du sport, des séances de kiné sont indispensables.Mais il y a certaines situations de crises intenses où malheureusement la seule solution est le recours à des traitements de choc qui soulagent mais peuvent avoir des effets secondaires gênants. Je n'avale pas de gaité de cœur ce genre de produits! Contrairement à ce que prétendent beaucoup de médecins, ils n'écoutent pas leurs patients. Ces derniers doivent entrer dans un cadre et s'ils n'y entrent pas, tant pis pour eux...C'est la première fois que je réagis à votre présentation d'un livre alors que je me rends régulièrement sur votre blog mais je suis plutôt à vif sur ce sujet! L'interview avait eu lieu lors de l'émission C'est à vous. Bonne continuation.
L
un sujet délicat effectivement, je n'ai pas entendu ces propos, mais je te crois. (mais rien de ce genre dans ce livre, les auteurs citent des faits bien plus larges et des chiffres, et des situations ubuesques qu'on n'imagine pas possibles !) Ceci dit, les anti-inflammatoires soulagent sur le moment et permettent de bouger (j'avais le dos coincé il y a moins d'une semaine, j'en ai avalé !) mais ne règlent pas le problème à long terme : mes torticolis se sont réglés il y a qqs années chez l'ostéopathe, et mes lombalgies, ben oui, j'en aurais moins si je me musclais cette région-là, si je faisais les bons mouvements au travail, etc. et c'est mon médecin qui me le dit. De la mesure en toutes choses, et du bon sens, là est sans doute la solution la moins mauvaise.