Les jardins d'Hélène

Nos âmes seules - Luc Blanvillain

20 Octobre 2015, 07:47am

Publié par Laure

Clément travaille chez Vogal Software, une boite d'informatique haut perchée dans une tour du quartier de la Défense. Il analyse tout dans sa vie, son travail, sa relation de couple, il est sous pression en permanence. L'évanouissement de la femme de ménage dans l'escalier et la rencontre dans ce même escalier de l'entreprise avec l'étonnante et fantasque Meryl vont bouleverser sa vie.

 

Souvent présenté comme un roman sur le monde de l'entreprise, j'étais assez peu tentée, mais curieuse des bonnes critiques néanmoins, je me suis lancée. Et j'ai immédiatement été en empathie avec les personnages de Clément et Meryl, fragiles, en quête de soi et de l'autre, plus humains et vulnérables que l'assurance froide qu'ils veulent bien montrer aux autres (du moins pour Clément, Meryl est d'emblée bien plus décalée).

Le roman interroge sur la relation de couple, sur le rapport entre travail et vie privée, sur la manipulation et les faux-semblants, mais il me semble qu'il est avant tout un roman sur nos ultra modernes solitudes intimes et profondes.

Il est en cela très réussi, attachant, le personnage de Meryl apporte surprise et envie d'avancer (que va-t-il donc se passer à chaque fois avec elle?), la compagne Myriam ainsi que quelques personnages secondaires sont bien campés.

L'auteur au passage analyse et décrit très bien le mécanisme des attaques de panique et l'engrenage des crises d'angoisse.

J'ai eu un réel plaisir à les retrouver quelques soirées pour faire ce bout de chemin avec eux, mais suis juste un brin déçue par la fin, que j'aurais souhaitée plus fermée, ou alors que le chemin se poursuive un peu plus loin.

 

Quelques extraits :

 

Page 23 : « Personne ne peut imaginer ce qu'on ressent quand l'angoisse relâche sa prise. Ni comprendre à quel point le monde paraît neuf, intact, grisant. On ne va plus mourir. On aime les mots idiots, on aime l'air et le soleil dans les vitres. On aime les conventions, les chansons bêtes, les sentiments. Et puis revient la peur. La peur de l'angoisse. La peur d'avoir peur. »

 

Page 146 : «Dans le métro, il souffre. Une sorte de feed-back amoureux. Inévitable, bien sûr. La vie avec Myriam est si douce. Était. Il comprend maintenant, de l'intérieur, comment ses parents ont pu vivre ensemble si longtemps. A elle seule, la proximité crée de la douceur. La chaleur d'un autre humain. Le monde extérieur n'en propose pas. Elle ne s'achète ni ne se décrète. Deux personnes suffisent à former un petit troupeau. Le couple offre une grégarité liminaire, tout à fait suffisante, plus légère pour les transhumances et non moins rassurante. S'il formulait ces pensées à voix haute, Clément passerait pour cynique, mais sa rupture lui a dévoilé le caractère clanique de la conjugalité. Sa souffrance est celle d'un banni. »

 

Page 195 : « La liberté, répétait un prof de culture générale, en prépa, consiste moins à faire ce qu'on veut qu'à vouloir ce qu'on fait. Formule parfaite pour les managers. »

 

Page 266 : « La solitude a mille visages. Celle de Clément grouille de monde. »

 

 

Une lecture qui s'inscrit dans le Projet "68 Premières fois" de l'Insatiable Charlotte.

 

 

 

 

éd. Plon, août 2015, 328 pages, prix : 20,90 €

Etoiles :

Crédit photo couverture : © Marc Owen / Archangel et éd. Plon

 

Commenter cet article
N
Je suis en plein dedans... et j'adore !
Répondre
S
Je connais l'auteur pour ses romans jeunesse. Je me laisserai peut être tenter par celui-là si je tombe dessus à la médiathèque malgré les quelques réserves lues ça ou là.
Répondre
L
s'il n'y avait eu cette fin, je pense que je l'aurais davantage apprécié, mais j'ai beaucoup aimé les 2 premiers tiers. Après ça devient un peu "trop"...