Les jardins d'Hélène

Le consentement – Vanessa Springora

9 Janvier 2020, 17:01pm

Publié par Laure

Le consentement est le récit autobiographique de V. dans sa relation amoureuse avec G, alors qu’elle avait 14 ans en 1986, et qu’il en avait déjà plus de 50.

 

La presse et les médias font le reste aujourd’hui : ils ont mis des noms sur V. et G, et dénoncé des actes qui vont à l’encontre de la loi. A l’époque tout le monde savait. Mais personne n'a rien dit. Depuis #MeToo la parole des femmes s’est libérée et c’est tant mieux. Mais…

 

Grasset (ou tout autre éditeur) s’engage-t-il désormais à publier tous les récits de toutes les femmes victimes de violences, sexuelles, physiques ou psychologiques ? ça va en faire du monde sur les tables des libraires. Accordera-t-il la même valeur à toutes les paroles de toutes les femmes ?

 

N’y a-t-il pas un opportunisme malsain à sortir aujourd’hui une affaire qui aurait dû se régler depuis bien longtemps devant les tribunaux et dans le cabinet d’un psychothérapeute ? Pourquoi aujourd’hui ? Pourquoi mettre des noms là où Vanessa Springora n’en met pas ?

 

Les présentateurs télé et les éditeurs font aujourd’hui leur mea culpa. Et avant ? Ils étaient aveugles sourds et muets ? Aveuglés par un monde artistique parisianiste à vomir ?

 

On lit ici ou là que Vanessa Springora est courageuse et que son récit a ceci de plus qu’il a une vraie qualité littéraire. Rien qui se remarque en tout cas. Ce n’est pas mal écrit, ça ne se distingue pas non plus. La littérature a bon dos. N’est-ce pas déjà ce que l’on disait au moment des faits quand on voulait fermer les yeux sur le contenu des livres et journaux de G. ?

 

Vanessa Springora ainsi que son éditeur ont-ils émis le souhait de verser leurs droits d’auteur et bénéfices à des associations de protection de l’enfance ou de femmes ? Ce serait louable mais je n’ai à ce jour rien lu ou entendu dans ce sens.

 

Quant au contenu du livre, tout est dit dans la presse, les passages glauques ou sulfureux sont cités dans les meilleures feuilles, l’extrait de l’émission de Pivot où la canadienne Denise Bombardier est la seule à s’émouvoir de la situation tourne en boucle sur le net (et le passage est bien dans le livre), vous pouvez économiser 18 €.

 

J’ai voulu me faire mon propre avis. Eh bien je ne comprends toujours pas les raisons qui ont conduit à cette publication. Je souhaite juste que tout autre victime de n’importe quel autre prédateur sexuel puisse s’exprimer de la même façon, qu’on lui donne les mêmes moyens de le faire, y compris et surtout si elle n’est ni éditrice ni parisienne.

 

Extraits :

p.5/150 (numérique) : « Depuis tant d’années, je tourne en rond dans ma cage, mes rêves sont peuplés de meurtre et de vengeance. Jusqu’au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence. : prendre le chasseur à son propre piège, l’enfermer dans un livre. »

 

p. 88/150 (numérique) : « G. n’était pas un homme comme les autres. Il avait fait profession de n’avoir de relations sexuelles qu’avec des filles vierges ou des garçons à peine pubères pour en retracer le récit dans ses livres. Comme il était en train de le faire en s’emparant de ma jeunesse à des fins sexuelles et littéraires. Chaque jour, grâce à moi, il assouvissait une passion réprouvée par la loi, et cette victoire, il la brandirait bientôt triomphalement dans un nouveau roman. »

 

p. 119/150 (numérique) : « Les écrivains sont des gens qui ne gagnent pas toujours à être connus. On aurait tort de croire qu’ils sont comme tout le monde. Ils sont bien pires.

Ce sont des vampires.

C’en est fini, pour moi, de toute velléité littéraire.

J’arrête de tenir mon journal.

Je me détourne des livres.

Plus jamais je n’envisage d’écrire. »

 

 

 

Grasset, janvier 2020, 216 pages, prix : 18 €, ISBN : 978-2-246-82269-1

 

 

 

Crédit photo couverture : © éd. Grasset

 

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K
Point de vue très intéressant et le premier de ce genre qu'on voit sur les blogs. Bravo ! C'est courageux d'aller à l'encontre de l'opinion commune.
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L
Le problème est sûrement le traitement médiatique du livre avant même sa sortie, il aurait peut-être été reçu différemment sans cela....
A
Dans mes bras que je t'embrasse !
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L
Tu ne sais pas à quel point tu me fais plaisir, je me sentais bien seule sur ce coup-là.