Un si petit monde – Jean-Philippe Blondel
Ce titre fait suite à la grande escapade, publié en août 2019 (qui sort en poche chez Folio en même temps que ce tome 2), c’est donc un tome central, avant le dernier d’une trilogie annoncée.
On retrouve les personnages de la grande escapade, après un saut dans le temps de 1975 à 1989, c’est la chute du Mur de Berlin, puis le début de la guerre du Golfe, le démantèlement des pays de l’Est, etc. Philippe Goubert est devenu prof d’anglais, il semble doué dans cette vocation, hésite à suivre Annette en Allemagne, et l’on n’en saura guère plus sur lui. On l’avait quitté à la fin du tome 1 en se doutant qu’il deviendrait écrivain, ce n’est pas encore pour cette fois.
L’inconvénient d’une lecture numérique, c’est que je n’ai découvert qu’à la toute fin la page récapitulative des noms des personnages, leurs liens familiaux, et j’en aurais eu bien besoin au début de l’ouvrage ! En édition papier, je l’aurais peut-être feuilleté et trouvé plus tôt ! Difficile de se souvenir presque deux ans après des interactions entre les uns et les autres. J’ai fini par conclure que tout le monde couchait avec tout le monde, tout le monde trompait tout le monde, tout le monde mourait, se suicidait ou en avait envie, et les vivants n’ont qu’une envie, se sortir de ce petit monde aux faux-semblants qui sauvent les apparences. Forcément, des secrets de famille éclatent, et au final, il ne se passe pas grand-chose.
« L’ensemble distille un ennui poli », dit une blogueuse aussi vieille que moi dans ce tout petit monde.
Je ne peux que vous conseiller de lire les deux tomes dans la foulée, car pour moi, le hic, c’est que ce tome 2 lu séparément ne fonctionne pas. On ne sait pas qui est qui, et on reste grandement sur sa faim. On touche là à une stratégie éditoriale qui n’a rien à voir avec la qualité du roman [Blondel sait écrire, je ne remets pas cela en cause], mais qui pour moi soulève ces questions-là :
- Un auteur tombe-t-il dans l’oubli s’il ne publie pas comme un métronome, tous les ans, ou deux ans grand maximum ?
- N’eut-il pas mieux valu attendre 5 ans et avoir un bon gros pavé comprenant la trilogie comme une seule œuvre, certes un peu plus chère qu’un volume à l’unité, mais dans laquelle le lecteur se plonge avec bonheur et en ressort heureux ?
- Faut-il absolument coller à l’air du temps qui veut qu’aujourd’hui, un livre doit faire 250 pages max (le lecteur n’a pas le temps et veut du vite lu, ça se confirme tous les jours dans mon travail) et coûter 20€ max, au-delà c’est trop cher ? [On hésite plus pour un pavé à 25 € ? – pas pour un auteur qu’on suit !]
- On le sait, les tomes 1 se vendent plus que les tomes 2, et ainsi de suite decrescendo. On perd du monde en route. Toujours. Parce que tout le monde ne suit pas l’actualité littéraire, parce qu’on oublie, parce qu’on n’a pas compris qu’il s’agissait d’une trilogie. Ou parce qu’on n’a pas aimé.
- Le roman dans son entier nous aura coûté presque 60 €, on en pense quoi, de cette stratégie de vente ?
- Les volumes peuvent-ils se lire indépendamment ? En théorie oui. En réalité dans ce cas précis je ne trouve pas.
Je lirai le tome 3 parce que c’est JPB, mais pour moi ce choix de publication échelonnée est une erreur. Désolée.
Buchet Chastel, mars 2021, 256 pages, prix : 18 €, ISBN : 978-2-283-03407-1
Crédit photo couverture : © Hinterhaus Productions / Getty Images / et éd. Buchet Chastel