Janvier 2024 en couvertures...
En janvier, j'ai lu :
Quinqua, bibliothécaire, avec thé et chats. Je dépose ici les marques que mes lectures ont tracées.
En janvier, j'ai lu :
Un narrateur dont nous ne connaîtrons pas le prénom raconte son enfance, de son entrée à l’école maternelle jusqu’au baccalauréat, à St Étienne dans les années 1960, avec un passage obligé par le football.
Cela pourrait paraître banal mais c’est terriblement attachant. Il y a une magie dans l’écriture qui berce entre attendrissement et étonnement, avec beaucoup de sensibilité (mais pas de sensiblerie). Car certains passages interpellent, l’incipit notamment “Quand j’étais enfant je trouvais tout normal. Ma mère m’enfermait régulièrement à la cave, dans le noir complet. Je trouvais ça normal”, alors que rien ensuite n’y reviendra. Il y a bien quelques bizarreries, mais l’ensemble trouvera sa clé dans la fin, jusque dans la toute dernière phrase. Et l’on se surprend à se demander si l’on a bien compris, on revient sur certains passages au début, ceux sur la mère entre autres, et là oui, bien sûr, tout était dit, de manière elliptique ; la fin éclaire tous les étonnements du lecteur, toutes les obsessions de l’enfant. Et une telle construction en apothéose, ce n’est pas si courant.
Je ne connaissais pas Luc Chomarat, je n’avais jamais rien lu de lui, mais je vais désormais jeter un œil attentif à ses romans.
Un extrait qui fera sourire un grand nombre de lecteurs, sur les dernières années collège : “Il y a aussi des cours qui disparaissent, heureusement. On ne fait plus de technologie ni de flûte à bec au bout d’un moment. En technologie on doit apporter un Té qui est une grande règle en bois inutile. La flûte à bec est un instrument pourri dont personne ne joue sur aucun disque et qui n’existe qu’au collège. Le prof de musique déteste le monde entier.”
La manufacture de livres, août 2021, 264 pages, prix : 19,90 €, ISBN : 978-2-35887-774-9
Crédit photo couverture : © Deepol / plainpicture et éd. la manufacture de livres
Lou est désormais une jeune adulte (depuis le tome 1 de Lou ! Sonata où elle était étudiante) et dans ce tome, elle se démène dans l’organisation d’un festival de musique à Mortebouse.
Comment dire…
Vivant en campagne, j’ai deux festivals de ce type autour de moi, dont l’un regroupe aussi un espace librairie avec dédicaces, et l’autre a été monté par des jeunes du village. Donc c’est pleinement crédible, mais à part s’agiter dans tous les sens pour brasser du vent, que se passe-t-il dans ce tome ? Oui il faut coordonner l’équipe de bénévoles, oui il faut s’assurer que tout se passe bien en temps et en heure et oui il n’y a jamais rien qui se passe comme prévu, mais délayer cela sur 140 pages sans autre trouvaille au scénario, c’est un peu léger non ?
Alors oui des personnages reviennent mais il n’y a pas d’interaction avec eux, et si les lectrices de Lou ! vieillissent avec elle depuis le début, elles ne sont pas encore atteintes de dégénérescence visuelle au point de devoir lire des bulles en police de caractère corps 20 si ce n’est 30 sur certaines.
On a l’impression dans ce tome qu’il faut meubler pour arriver jusqu’au cliffhanger final qui annonce un tome 3, mais que c’est laborieux tant il n’y a rien à dire ! Limite j’ai trouvé bien plus intéressant le cahier final qui explique le travail de l’auteur-illustrateur, bien plus fouillé, bien plus recherché, bien plus joli. Est-ce la pression éditoriale ? Commerciale ? Parfois il faut savoir s’arrêter à temps. Même si clairement je n’ai plus l’âge du lectorat visé, en tant que lectrice curieuse je suis très très déçue, et en tant que professionnelle je sais que cette BD va plaire à toutes les petites filles fidèles et qu’elle n’aura pas besoin de moi pour en faire la médiation. Tiens, c’est ce qu’on se dit à chaque ouvrage commercial.
Aïe ça pique.
Glénat, novembre 2023, 144 pages, prix : 17,50 €, ISBN : 978-2-344-04974-7
Crédit photo couverture : © Julien Neel et éd. Glénat
(le loup en slip tome 8, qui se lit tout à fait indépendamment des autres)
Ah la la, Grumo le zozio n’en peut plus de la langue française, de sa complexité et de ses exceptions : “Mais pourquoi on entend le P du slip et pas le P du loup ? Pourquoi t’es le lou en slip et pas le loupe en sli ?” Pas de panique, les vieilles taupes de l’académie des mots s’y connaissent !
Un régal si vous aimez la langue et ses subtilités, l’étymologie et les réparties saugrenues de nos deux compères (éclats de rire garantis), je ne sais pas si cet album va réconcilier les Anciens et les Modernes ou régler vos problèmes d’orthographe, en tout cas il éclaire et amuse, le tout dans un texte très travaillé (bourré d'assonances, de rimes et d’allitérations) et un dessin aux petits oignons. L’Académie Française en prend pour son grade, car la langue, ça vit et on en joue, ça emprunte aux uns et aux autres, on compose, on la tricote, on la détricote.
Un très bon loup en slip avec ou sans son P.
Bonus : patarder, vous connaissez ? c’est canarder au lance-patates. Sérieux, on se marre avec leur vocabulaire chelou, lexique offert à la fin de l’ouvrage.
(Livre emprunté en bibliothèque)
Dargaud, 10 novembre 2023, 40 pages, prix : 10,95 €, ISBN : 978-2-505-12479-5
Crédit photo couverture : © Mayana Itoïz et éd. Dargaud
Premier thriller à quatre mains du duo à la ville comme à la plume : Johanna Djikstra, photographe et créatrice de mode, et Pierrick Guillaume, commandant à la PJ de Paris, et nul doute que leur parcours professionnel légitime le contenu de leur premier roman.
Aux pieds de Montmartre, une jeune femme est retrouvée morte. Carmen Ricci, commandant de police dans la vie et promeneuse tel un chat sur les toits de Paris à ses heures, ne croit pas à une mort naturelle énoncée au premier abord.
Son enquête va la mener à Venise et faire ressurgir cas similaires antérieurs.
Le roman montre un bon dynamisme naturel et un personnage féminin fort : on la suit avec plaisir dans ses déambulations aux détails riches de mode haute couture et dans les canaux vénitiens où elle affirme son caractère bien trempé face aux hommes.
Mais c’est alors que naît une romance dont on se demande bien ce qu’elle vient faire là (j’ai signé mon pacte tacite de lectrice pour un thriller, pas pour une histoire d’amour à l’eau de rose), si ce n’est qu’elle va déterminer en effet toute la seconde moitié du roman et il suffit d’une phrase page 202 pour que dès lors le lecteur comprenne le nom du tueur et ait toujours une longueur d’avance sur le texte. Quel dommage !
La lecture alors (qu’on imagine bien adaptée en série télé, aux scènes très visuelles), si elle reste agréable (et il reste 150 pages !), permet surtout d’arriver à la conclusion attendue, sans omettre un dernier twist un peu facile qui trouvera sans doute sa suite dans un nouvel épisode.
C’est donc un premier roman policier entraînant, avec quelques maladresses de débutant, mais qui à mon sens colle parfaitement avec le label Mazarine des éditions Fayard, qui publie notamment Aurélie Valognes, Zoé Brisby, Baptiste Beaulieu (avant qu’il ne passe à l’Iconoclaste) et JP Delaney pour le thriller. Une lecture détente, aux contours glamour et sensuels dans une intrigue policière au vocabulaire réaliste “police judiciaire”.
(Livre reçu en service de presse)
éd. Mazarine (Fayard), octobre 2023, 356 pages, prix : 20 €, ISBN : 978-2-863-74887-9
Crédit photo couverture : © Ségolène Girard et éd. Fayard.