C'est l'histoire d'un garçon qui vit seul - avec un Cactus - dans sa maison bien ordonnée, au rythme de journées tout aussi bien réglées. Le dessin est graphique, tout est bien aligné, crayon gris, quelques traits bleus, nuances sépia, noir et brun. Mais un jour au réveil, tout est dérangé. Cactus est renversé et l'ours n'est plus dans le tableau. Le désordre, le jeu et la joie entrent dans la maison, c'est aussi simple que cela. Un curieux et bel album qui surprend par son histoire et séduit par son dessin, il suffit de se laisser porter par l'irruption de ce petit grain de sel dans le scénario (un ours quand même) et d'entrer dans le jeu du petit garçon. Un peu de surprise, de fantaisie et de bonheur simple dans la vie !
On notera le beau choix de papier et de couleur pour l'édition.
Cet album jeunesse est la suite de "Comment attraper un ours qui aime lire" mais peut bien évidemment se lire indépendamment. Une nuit d'été, Julie et ses amis font du camping dans la forêt. Tous attendent le moment de la tombée de la nuit pour leur rituel de lecture du soir. Mais Julia a oublié son livre ! Arrive l'ours Bertrand qui les embarque sur son radeau pour une visite à la bibli - Les ours n'ont pas de carte de bibli mais la bibliothécaire (une chouette qui s'appelle Josette) en laisse toujours à l'extérieur. Ils veulent une histoire pour s'endormir qui se passe de nuit, en mer, avec un sauvetage héroïque et des personnages très courageux ! Odile a de l'expérience, elle leur trouve cette histoire qui ressemble curieusement à la leur.
Les illustrations sont belles et colorées, lumineuses bien que l'histoire, toute mignonne, se déroule de nuit, dans des tons de bleu essentiellement. Cet album me rappelle un peu la série "Edmond et ses amis".
Une dernière double page explique les noms animaliers des constellations et un QRcode permet d'écouter la chanson de Julia.
Editions Chouette / CrackBoom!, janvier 2023, 36 pages, prix : 11,90 €, ISBN : 978-2898023224
C’est l’histoire d’une petite graine (un pépin de pomme) qui grandira et deviendra un beau pommier, aidée et protégée par la pluie, le soleil, et la terre. A son tour, l’arbre accueillera une fauvette à tête noire, un bel oiseau qui donnera la vie. Et quand il faudra sauver une graine perdue du pommier, la fauvette rendra à l’arbre ce qu’il lui a donné : aide et protection.
Ce très bel album, aux magnifiques couleurs (un vrai coup de cœur sur ce point !) illustre le cycle de la vie et l’entraide nécessaire entre la nature et la vie, animale ou végétale, que l’on pourra bien sûr étendre à l’humain et à la nécessité pour l’homme de les protéger.
Une dernière page résume le cycle de la vie du pépin de pomme, et comment planter ses propres graines pour les regarder grandir.
Une belle histoire douce et joyeusement colorée à partager dès 3 ans.
Crackboom ! Livres, éditions Chouette (Québec), octobre 2022, prix : 11,90€, ISBN 9782898023934
L’histoire d’une naissance racontée à la première personne, par le bébé pendant la grossesse jusqu’à son arrivée, au sein de ce couple aimant : lui et son sourire si doux, elle et le bleu profond de ses yeux. La mère, qui a toujours une touche de jaune dans ses vêtements, porte la lumière et la vie. Le jaune illumine d’ailleurs largement l’album, des pages de garde aux petites touches qui accentuent un détail ou un décor.
Le couple porte l’amour, l’amour entre eux et l’amour déjà si présent pour l’enfant à naître. Ville, campagne, maison, maison dans la maison, maternité et jardin : Elle lui moi, c’est une formidable et douce histoire d’amour, de celle du couple à l’arrivée du premier enfant.
Albin Michel Jeunesse, mars 2022, 40 pages, prix : 14,90 €, ISBN : 978-2-226-46907-6
J'ai tout aimé dans cet album qui revisite une fable mettant en scène un corbeau et un renard : un texte original qui remet à sa place un arrogant et pédant corbeau fier d'être très haut placé (on y verra les références que l'on veut !) et un délicieux renard bien plus humble et sincère ; des illustrations choisies dans une palette chromatique limitée mais ô combien réussie ; la possibilité d'ébaucher une réflexion sur la solitude du pouvoir, l'amitié, la peur de l'autre, etc.
« Piloti est un chien. C’est même un teckel nain. » Piloti a un œil bleu, et l’autre brun. Piloti a un maitre qui le prend en photo dans divers décors naturels, de la forêt à la mer en passant par un tronc d’arbre tordu, mais aussi dans son intérieur. Un maître qui s’interroge sur sa relation à son petit chien. « Il y a un grand mystère dans notre grande entente. Après réflexion : voici ma conclusion. Piloti est un être teckel et moi un humain nain. » Piloti n’est pas de sa famille et pourtant il en fait partie, quel lien les unit donc ?
Coup de cœur pour cet album jeunesse qu’on peut lire et aimer à tout âge, qui fait réfléchir à l’attachement, et pour ses superbes photos (cadrage, couleurs, lumière, choix du décor).
La mise en page est réussie (court texte sur une à quatre lignes page de gauche sur fond blanc, photo pleine page page de droite), sobre mais efficace. Même les pages intérieures de couverture sont travaillées : un œil bleu pupille noire au début, un œil brun pupille noire à la fin. Piloti en a de la chance d’être le héros de ce si bel album, et c’est autant grâce à lui qu’à son maitre.
10 personnages dans une grande maison au bord de la mer, qui vont partir à l’aventure de nuit. L’histoire nous est contée par Rosie, l’une d’entre eux.
Rien ne leur fait peur, rien ne les divise. Mais le décompte s’enclenche, comme dans les Dix petits nègres d’Agatha Christie, et au fur et à mesure du retrait des enfants, le courage n’est plus aussi vaillant, la peur n’est plus aussi invincible, jusqu’à la chute, vraiment inattendue et drôle, qui dédramatise l’atmosphère instaurée au fil du texte et de l’illustration.
Le texte est superbement travaillé à la façon d’une comptine rimée, le jeu de la typo en majuscules sur certains groupes de mots scande l’avancée de la peur comme un refrain, en même temps que le compte à rebours qui conduit à « j’étais seule ».
Très réussi, cet album se relit inlassablement.
A partir de 5 / 6 ans.
Albin Michel Jeunesse, coll. TrapèZe, janvier 2018, 48 pages, prix : 18 €, ISBN : 978-2-226-40156-4
C’est l’histoire toute douce d’un papa qui regarde son petit grandir et qui aimerait parfois arrêter le temps pour garder immuables ces moments père-fils, ce lien d’amour, d’observation, de protection, de sourires, un lien que l’on n’oublie pas, d’un côté comme de l’autre.
J’aime toujours autant les illustrations de Stéphane Kiehl, ces fondus de vert, ces superpositions de blanc, et ici le choix surprenant de tenues préhistoriques, devant une grotte avec quelques mammouths en fond, en décalage avec le texte ; « Robin des Bois à la télé, en slip chaussettes sur le canap », peut-être parce qu’un père reste un père depuis la nuit des temps ?
Et dans le choix de couleur, cette petite touche de jaune, souvent discrète, mais présente à chaque page pour dire la lumière de la vie. Le décor naturel occupe une belle place comme toujours chez Kiehl et le texte de Nicolas Mathieu n’en oublie pas d’être réaliste : « Il fera chaud, de plus en plus, et j’espère que tu seras heureux, malgré le cours des choses… Et les guerres possibles. »
Un superbe album pour tous les papas du monde et pour tous leurs enfants.
Marie-Aude Brosse est passionnée de jeux vidéo, à tel point qu’elle joue une bonne partie de la nuit sous la couette, tant elle est accro et pressée de finir Diego 3D Mundo. Surprise par son père, ce dernier jette la console Swift par la fenêtre. De colère, Marie-Aude jette le smartphone de son père par la fenêtre itou. La Play de son frère Gabriel finit à son tour sur le pare-brise des policiers garés sous les fenêtres de la famille Brosse. Les écrans rendent fous dans cette famille et seule la mère semble avoir encore un peu la tête sur les épaules.
Peu importe l’état de fatigue de Marie-Aude, elle ira à l’école le lendemain, même si elle dort en classe. Et ne manque pas de basculer dans des mondes parallèles où elle court l’aventure avec son ami Louis J. (car il y a aussi un Louis B. mais il fallait bien faire le lien avec Luigi voyons !)
Un petit roman amusant bourré de références à Mario Bros, qui joue du réalisme, de la mise en garde du débordement, et de l’évasion entre rêve et jeu. Caramboutcha ! Attention au réveil et aux sanctions des adultes (surtout quand on s’enfuit de l’école !) mais la chute est drôle.
Extrait p. 39 : « Comment je vais faire, moi, sans console de jeux ? Tous les enfants ont une console de jeux. C’est la base d’avoir une console de jeux.
- Il y a plein d’enfants qui n’ont pas de console de jeux, Marie-Aude, répond ma mère. Regarde tes cousins, Maël et Christophe, ils n’en ont pas et ils vont très bien.
- Mais maman, ils vivent comme des sauvages au fin fond de la cambrousse. Ils mangent pas de viande. Ils ont des toilettes sèches.
- Je vois pas le rapport.
- Bah moi je le vois très bien le rapport et en plus c’est pas vrai ce que tu dis qu’ils vont très bien. Maël, il m’a dit qu’au collège, il était le seul – comme Gabriel, d’ailleurs – à ne pas avoir de portable et que tout le monde l’affichait à cause de ça. Leurs parents sont des dangereux sadiques et je te préviens qu’il est hors de question que vous fassiez pareil avec nous ! »
Il s’est amusé l’auteur là non ? 😉
Bon perso je ne suis pas fan des illustrations un brin psychédéliques qui colorent le roman, mais elles sont cohérentes avec le texte.
A partir de 8 ans.
Seuil jeunesse, coll. Le grand bain, avril 2022, 101 pages, ISBN : 979-10-235-1662-3
Lorenzo déménage avec sa maman pour s'installer dans une maison ancienne. Un secrétaire est resté dans la chambre qu'il va occuper. Il découvre un cahier derrière un panneau secret.
Lorenzo va peu à peu oublier son univers hyperconnecté et lâcher son smartphone pour se pencher sur les histoires faites de collages et de papiers découpés. Dans chacune d'elle c'est un animal qui raconte l'histoire. Les scènes se repèrent très facilement dans la narration sous la forme de chapitres sur fond jaune. Ces récits vont s'insérer dans le quotidien bien réel de Lorenzo.
Petit à petit l'enfant va vouloir utiliser le même mode de communication, tout en menant l'enquête autour d'éléments de décor troublants autour de lui.
La frontière est fragile entre imaginaire et réalité, mais le message est magnifique, ce gros album (184 pages) est un hommage au pouvoir de la lecture, à l'écriture, à la liberté de l'imagination et à la transmission à travers les générations.
Levez les yeux de votre écran et posez-les sur ces pages !
(dès 8/9 ans)
Seuil jeunesse, septembre 2021, 184 pages, prix : 21,90 €, ISBN : 979-10-235-1525-1