Instants nomades – Catherine Matausch (photographies) et Stéphane Beau (textes)
(Préface d'Eric-Emmanuel Schmitt)
Catherine Matausch est journaliste, aux commandes du JT du week-end sur France 3, mais j’ignorais qu’elle était aussi artiste (peintures, pastels, photographies). Stéphane Beau est le fondateur d’une revue disparue, Le Grognard, mais aussi romancier (j’avais beaucoup aimé Les en dehors, en 2011.)
Instants nomades est un recueil de photographies de Catherine Matausch, prises à l’Iphone, accompagnées chacune de quelques lignes poétiques de Stéphane Beau. L’ouvrage est soigné, la mise en page parfaite (page de gauche, photo encadrée de noir, page de droite, court poème ou aphorisme et pagination soulignée à hauteur du cadre de gauche, c’est harmonieux et sobre.
Comment parler de photographies quand on n’y connait strictement rien, pas plus en vocabulaire adéquat qu’en technique ? À part dire j’aime ou pas, j’y suis sensible ou pas… Ce qui m’a frappée d’emblée en feuilletant ce livre la première fois, c’est l’aspect « trafiqué » : aucune photo n’est naturelle, toutes, en noir et blanc, me semblent passées à l’artifice d’un filtre Instagram. Le résultat peut être surprenant sur certaines photos, de même que les photos floues (très floues pour certaines, interpellent : pourquoi ce choix ? qu’a voulu transmettre l’artiste ?)
Hormis un grand nombre de photos de bord de mer, de plages ou de bateaux, il n’y a pas forcément d’unité qui ressort au premier abord. Pourquoi ce chat de dos, cet escalier, cette forêt… « Instants nomades » dit le titre, c’est justement cet éclectisme qui fait l’unité.
Si je ne sais pas parler des photos (je ne sais peut-être pas le faire des textes non plus !), j’ai néanmoins été bien plus sensible à ceux-ci. Et ils éclairent, d’un regard subjectif, la photo placée en regard. Certains font sourire, pencher la tête d’un mouvement d’approbation, reconsidérer l’image, oui c’est vrai, peut-être, pourquoi pas.
J’aime tout particulièrement ceux-ci (mais je pourrais en citer tant d’autres !) :
« Elle aimait se baigner
Au jour mourant
Dans les flots en fusion
Moi quand elle revenait
Lasse et salée
Se blottir sur mon cœur
Je cueillais sur son corps
Des éclats de soleil »
Ou encore
« Le flou artistique
Est une invention
De myope
Mégalomane »
Et l’on se surprend à reprendre l’ouvrage, à s’arrêter à nouveau sur une photo, un texte, s’arrêter justement, le temps d’un instant, contempler la vie qu’on ne prend plus le temps de voir. Des instants apaisés, même dans la trivialité de certaines photos (finir par un cliché de toilettes ?)
Si vous en avez l’occasion, prenez le temps de vous arrêter sur cet ouvrage. Ma fille qui passait par là, depuis longtemps résignée aux piles de livres qui trainent partout dans la maison, a stoppé son geste le temps de dire : « oh, il est beau ton livre ». Celui-ci l’a arrêtée ; pas les autres.
En savoir plus sur le site ce petit éditeur nantais et voir quelques photos : ici
éd. du petit véhicule, juillet 2014, ISBN 978-2-84273-953-9, prix : 20 €
Livre relié à la chinoise, Illustré en couleur, 113 p., 21 X 21 cm
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Crédit photo couverture : © Catherine Matausch et éd. du petit véhicule.