Les jardins d'Hélène

Le monde sensible – Nathalie Gendrot

26 Mai 2016, 09:11am

Publié par Laure

Le monde sensible - Nathalie Gendrot

Delphine, la narratrice, dans un récit à la première personne, raconte sa rencontre amoureuse et l’hospitalisation qui a suivi après un accident en traversant un carrefour pour aller rejoindre son amant.

 

La partie la plus importante du roman est celle de l’hospitalisation, où Morphée et morphine se côtoient dans le déroulement des jours et des nuits de Delphine, qui tient des propos parfois décousus, en proie à l’hallucination opiacée.

 

Mesurer sa douleur sur une échelle de 1 à 10 est un fait qui rythme ses journées et qui trouve un drôle d’écho dans l’émission « Des chiffres et des lettres » que sa voisine de chambre écoute à la télé. S’y mêlent aussi des formules chimiques, celles des substances qu’on lui instille et notamment la morphine.

 

Le propos est parfois déroutant mais également fascinant tant il semble bien retranscrire une possible réaction sous antidouleurs de ce type. De la salle de réveil en soins intensifs au retour à la maison chez ses parents (elle a besoin d’une longue convalescence), c’est le parcours du corps et de l’esprit qui est décrit, tout comme le monde hospitalier avec ses protocoles et ses agacements.

 

Intéressant, bien écrit, souvent surprenant (je trouve qu’il n’est pas si facile de comprendre l’accident immédiatement si l’on n’a pas lu la quatrième de couverture ou d’autres critiques avant), ce premier roman est original et fascine par son exploration de l’hallucination qui se traduit par une écriture parfois déconstruite et fantasmagorique.

 

p. 49/50 : « Les infirmières m’avaient demandé où se situaient ma douleur, sur une échelle de 0 à 10. « 0 ça veut dire pas mal du tout et 10 c’est la douleur la plus intense possible. » J’avais le choix entre dix chiffres, onze en comptant le zéro. Zéro est l’ailleurs du corps, celui qui ne sent pas. La non-douleur, la paralysie, la tétanie, l’insensation : tout un monde s’ouvre derrière ce zéro. C’est le monde insensible. A partir de 1, on passe de l’autre côté, celui qui perçoit, qui sent. De 1 à 10, on fait le tour du monde sensible. »

 

p. 73 : « Morphine ne fait pas mourir la Douleur, elle oblige à regarder ailleurs. »

 

 

Pour les Sarthois, Nathalie Gendrot sera samedi 28 mai 2016 à la Librairie L'Ancre des Mots à Sablé sur Sarthe, à partir de 15h.

 

Ed. de l’Olivier, janvier 2016, 183 pages, prix : 16 €

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Crédit photo couverture : © cedric©scandella.fr / et éd. de L’Olivier

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