Les jardins d'Hélène

Ne m’appelle pas Capitaine – Lyonel Trouillot

17 Avril 2019, 10:49am

Publié par Laure

A Port-au-Prince, Aude, étudiante en journalisme, décide d’interroger pour un devoir un vieil homme surnommé Capitaine, dans le quartier défavorisé de Morne Dédé. Elle est issue d’une grande famille bourgeoise blanche, il vit dans un vieux quartier pauvre et sombre, aux nombreuses histoires sordides.

 

C’est l’histoire d’une rencontre entre deux êtres que tout oppose, l’histoire d’un homme obsédé par un amour passé (qui est donc cette femme qui l’appelait Capitaine ?) qui vont trouver une façon commune de voir la vie, ou ce qu’ils peuvent en faire. Elle est tenace Aude, malgré les obstacles.

 

J’ai eu un peu de mal à entrer dans ce roman, sans doute la richesse de la langue, ample, le rythme parfois saccadé, l’alternance des voix et de la narration, mais je me suis attachée aux personnages. Il m’a manqué certainement aussi une connaissance suffisante d’Haïti. Un beau roman néanmoins.

 

 

Extrait p. 19 : « Le Morne Dédé. Ce qui avait été et ce qu’il en restait. Ce qui avait changé. J’étais venue pour cela. Réaliser mon premier stage de futur grand reporter. Enquêter sur des faits, des dates. Reconstituer une trame. Tissage et discontinuité, selon les termes du directeur. De quoi remettre un bon papier. Ce cours, c’était mon idée. Contre l’avis de la famille. De mes anciens condisciples du lycée français. De Julie, ma cousine préférée et ma meilleure amie. Seul l’oncle Antoine ne s’était pas opposé à mon choix. »

 

p. 45 : « J’ai pris rendez-vous dans ma tête, dans un lieu-dit le Morne Dédé, avec un vieux type qui a la bouche pleine de souvenirs. Joueurs de foot et chanteurs de charme. Institutrices et ménagères. Sa bouche est un lieu de passage, une collecte de petits destins perdus dans les éphémérides. Il ne bouge plus beaucoup et tousse plus que de raison. Mais sa bouche est une vie des autres. On y entend tellement de voix qu’on ne sait laquelle est la sienne propre. Sauf quand monte le cri. Le presque cri. Il tousse trop pour pouvoir crier. Mais cachée sous les autres, il y a sa voix à lui. Une défaite et une révolte. Les deux en même temps. Je me demandais s’il lui viendrait l’envie un jour de me dire qui était cette femme qui entrait dans sa tête à n’importe quel moment, changeait son humeur, lumière et ténèbres, méritant la louange et l’injure. »

 

 

 

Du même auteur sur ce blog : L’amour avant que j’oublie

 

 

 

Actes Sud, août 2018, 147 pages, prix : 17,50€, ISBN : 978-2-33010875-5

 

 

 

Crédit photo couverture : © Kemi Mai / éd. Actes Sud

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