Les jardins d'Hélène

rentree litteraire d'hiver (2020)

Il est des hommes qui se perdront toujours – Rebecca Lighieri

16 Novembre 2020, 14:43pm

Publié par Laure

De la première à la dernière phrase, et sur près de 400 pages, jamais la qualité ou le rythme ne faiblissent : je le tiens mon coup de cœur de 2020 ! Et pourtant je l’avais un peu snobé : pas envie, trop vu, trop encensé, peur d’être déçue, tout le monde en parle au même moment, à quoi bon, puis six mois plus tard je me suis dit allez, essaie, au moins… Mais pourquoi ne l’ai-je pas fait plus tôt ? Lu en moins de 24h, fini à 2h et demi du matin, tant je ne pouvais pas les abandonner ces personnages ! quelle claque !

Alors oui c’est sombre, c’est dur, c’est violent, mais quelle beauté aussi dans cet amour fraternel mutuel et cette galère solidaire, quelle force dans chacun de ces trois enfants que l’on accompagne du milieu des années 1980 au début des années 2000 dans les quartiers nord de Marseille.

Une famille toxique, un père ignoble et ultraviolent, une mère paumée et effacée, un camp de gitans sédentarisés qui s’y substituent ou du moins aident à la survie, sous les mots de Karel, l’aîné, le récit réaliste et cru d’une enfance détruite, où la haine mène la danse jusqu’à la mort, celle-là même qui ouvre le texte. Tous les personnages, principaux et secondaires, ont une densité rare, tant dans leurs failles que leurs forces, contribuant de toute évidence à la puissance de ce roman noir et social, au souffle glacial et à la construction remarquable.

 

 

P.O.L, mars 2020, 372 pages, prix : 21 €, ISBN : 978-2-8180-4868-9

 

Crédit photo couverture : © éd. P.O.L

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Rivage de la colère - Caroline Laurent

26 Mai 2020, 13:54pm

Publié par Laure

En 1967, l’île Maurice devient indépendante mais les Britanniques vendent l’île de Diego Garcia, dans l’archipel des Chagos tout proche, aux Américains pour y installer une base militaire. Les Chagossiens sont contraints à l’exil et perdent tous leurs biens, leurs terres, et jusqu’au droit de revenir un jour sur leur île.

 

Cet épisode historique que j’ignorais totalement est narré à travers l’histoire d’amour entre Marie-Pierre Ladouceur et Gabriel Neymorin, ainsi que l’histoire de leurs familles respectives, pleine de rebondissements. Le récit est bien mené, use d’une chronologie éclatée qui malgré tout ne perd pas le lecteur, sauf peut-être au départ avec les nombreux prénoms de tous les personnages.

 

Le côté romanesque est peut-être un peu poussé, mais il fait aussi le charme de cette famille, et de ce couple auquel on s’attache très vite. Un très beau roman.

 

 

 

 

Les escales, janvier 2020, 412 pages, prix : 19,90 €, ISBN : 978-2-36569-402-5

 

 

 

Crédit photo couverture : © éd. Les Escales

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Augustin Mal n'est pas un assassin - Julie Douard

14 Avril 2020, 10:30am

Publié par Laure

Augustin Mal est un homme ordinaire qui a pour lui d’être bien éduqué, courtois, poli et propre sur lui. Du moins le croit-il, car son comportement est loin de le montrer. Il s’exprime sans filtre et ne s’embarrasse pas de codes sociaux ni de politesse bienveillante. Il est en manque d’amour et un peu de sexe ne lui déplairait pas. Il envie les femmes, car elles n’ont qu’à se laisser séduire, se servir et consommer !

 

Tout est simple finalement dans son monde, sauf que… tout ne se déroule pas comme il le croit. Il va rencontrer Gigi dans un groupe de parole, dont il ignore jusqu’au sujet des rencontres, sinon qu’elle dit beaucoup de mal de son mari, et que tous les gens qui sont là doivent être malades, sauf lui.

 

Et la situation va devenir… singulière, c’est le moins qu’on puisse dire. Quel curieux roman que ce petit ouvrage aussi bref que surprenant ! C’en est férocement drôle, la perception qu’a le héros de lui-même et celle qu’en a le lecteur étant diamétralement opposée. Un bonhomme sacrément dérangé, pour un roman qui ne laisse pas indifférent.

 

 

 

P.O.L, février 2020, 102 pages, prix : 13,90 €, ISBN : 978-2-8180-4932-7

 

 

 

Crédit photo couverture : © éditions P.O.L

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Les fleurs de l’ombre – Tatiana de Rosnay

30 Mars 2020, 17:59pm

Publié par Laure

Paris, dans un futur proche : la tour Eiffel a été détruite lors d’un attentat, le quartier a été entièrement reconstruit. C’est dans une résidence moderne entièrement neuve et sécurisée que s’installe Clarissa, qui a quitté son compagnon lorsqu’elle a découvert qu’il avait une liaison. Elle qui est ultrasensible à l’histoire des bâtiments, à la mémoire et à l’atmosphère qu’ils dégagent, pense pouvoir commencer une nouvelle vie dans cette résidence sans passé, appartenant au programme CASA réservé aux artistes.

 

Clarissa est écrivain, et tout dans son univers, rend hommage à Virginia Woolf et à Romain Gary, à commencer par son pseudo, « Clarissa Katsef », Clarissa pour Mrs Dalloway et Katsef pour le vrai nom de Gary : Kacev. Dans son appartement ultraconnecté, elle a d’ailleurs nommé son assistant domestique numérique Mrs Dalloway. Tout se commande de la voix. Mais très vite Clarissa se sent épiée et le malaise monte, jusqu’à sombrer dans la paranoïa ? A moins que tout ceci ne soit réel ?

 

Je retrouve Tatiana de Rosnay là où je ne l’attendais absolument pas : la dystopie. Mais une dystopie légère, crédible, qui sème le doute… et où la réflexion sur la création et l’amour reste présente.

 

L'héroïne est attachante, les personnages secondaires sont bien travaillés, et leur histoire donne à imaginer facilement ce que pourrait être le monde dans quelques années, et ce qu’il est déjà en partie d’ailleurs. Sans avoir lu le dernier Ian McEwan (Une machine comme moi, Gallimard 2020) auquel ces Fleurs de l’ombre m’ont fait penser, nul doute que l’intelligence artificielle inspire les écrivains !

 

Un titre plaisant, où l’imaginaire sème le doute : manipulation ou paranoïa ? Et dans quel but ? Qu’ont en commun tous ces résidents hormis d’être des artistes ? Et si même le chat Chablis y est sensible, alors c’est que c’est vrai ? Laissez-vous happer par ces fleurs de l’ombre !

 

 

 

Extraits :

P. 20 (numérique) : « La plupart des gens ne lisaient plus. Elle l’avait remarqué depuis un moment déjà. Ils étaient rivés à leur téléphone, à leur tablette. Les librairies fermaient les unes après les autres. Géomètre de l’intime, son plus grand succès, avait été tellement piraté depuis sa publication qu’il ne lui rapportait presque plus de droits d’auteur. D’un clic, on pouvait le télécharger, dans n’importe quelle langue. Au début, Clarissa avait tenté d’alerter son éditeur, mais elle s’était rendu compte que les éditeurs étaient démunis contre le piratage. Ils avaient d’autres angoisses. Ils faisaient face à ce problème encore plus inquiétant qu’elle voyait se propager comme une tumeur sournoise : la désaffection à l’égard de la lecture. Non, les livres ne faisaient plus rêver. On les achetait de moins en moins. La place phénoménale qu’avaient grignotée les réseaux sociaux dans la vie quotidienne de tout un chacun était certainement une des causes de cet abandon. »

 

 

p. 118 (numérique) : « Vos livres, leur réception, c’est chouette.

- Merci. Sauf que le public boude la lecture.

- Je sais, dit-il. Les gens prennent des jolies photos de livres, balancent ça sur les réseaux sociaux avec les bons hashtags, mais personne ne lit. Ou très peu. Les livres sont devenus des objets de décoration. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ed. Robert Laffont / Héloïse d’Ormesson, mars 2020, 329 pages, prix : 21,50 €

 

 

 

Crédit photo couverture : © Helen Crawford et éd. Robert Laffont / Héloïse d’Ormesson

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Préférer l’hiver – Aurélie Jeannin

23 Mars 2020, 12:16pm

Publié par Laure

Une mère et sa fille décident de se retirer dans une cabane dans la forêt, pour surmonter leur douleur respective et commune. Chacune a perdu son fils, l’une a donc aussi perdu son frère et l’autre son petit-fils. On découvrira doucement comment mais là n’est pas l’important.

 

Préférer l’hiver est un roman introspectif et contemplatif. La langue est belle, on y trouve des réflexions sur la nature, la rigueur de l’hiver, la solitude, la lecture, la souffrance, mais il ne se passe strictement rien d’autre que cet enchainement de pensées émanant de la fille.

 

Parfois ce n’est juste pas le bon livre au bon moment, mais celui-ci n’était pas pour moi. Je me suis forcée à le finir, et bien que je reconnaisse la qualité de l’écriture, je me suis tellement ennuyée que ce fut un supplice, peine que j’aurais dû m’épargner, l’autrice le dit elle-même vers la fin de l’ouvrage.

 

Extraits :

p. 40 « Maman distingue les écrivains et les romanciers. Elle dit que les romanciers savent raconter des histoires. Que ce qui importe aux écrivains, ce sont les mots, leur enchainement et leur rythme. Ceux qui excellent dans les deux, elle les appelle les auteurs. Et j’adore la voir savourer leur œuvre auprès du feu. »

 

p. 49 : « Nous parlons peu de nos lectures, solitaires ou partagées. Nous trouvons que commenter les romans les assèche. En revanche, nous adorons relever certaines phrases qui nous ont marquées. »

 

p. 63 : « Notre vie aujourd’hui ressemble à celle d’un pays en guerre. Nous vivons avec peu de choses, coupées du monde. Nous ne communiquons plus avec l’extérieur, et l’humain représente le plus souvent une menace. »

 

 

 

 

 

 

HarperCollins, coll. traversée, janvier 2020, 240 pages, prix : 17 €, ISBN : 979-10-339-0447-2

 

 

 

Crédit photo couverture : © HarperCollins

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Marche blanche – Claire Castillon

22 Mars 2020, 14:56pm

Publié par Laure

« Hortense a disparu le 23 janvier 2008 à 16h20 », échappant trente secondes à la vigilance de sa mère, le temps de compter jusqu’à vingt-sept pour une partie de cache-cache. Un enfant l’a vue, emportée par un « petit homme sec ».

La vie des parents d’Hortense s’effondre, et chaque année revient cette marche blanche pour elle, ces photos d’elle au visage vieilli imprimées sur les briques de lait dans l’espoir de nouvelles pistes, car « Tant qu’on ne nous apporte pas les preuves de sa mort, elle est vivante. Et moi, tant qu’elle n’est pas vivante, je suis morte. Il n’aime pas que je lui réponde des inepties. » (p.20/153 en numérique)

 

Dix ans plus tard emménage dans le pavillon d’en face une nouvelle famille, avec deux enfants, dont une ado de quatorze ans, Hélène. Elle a pile l’âge qu’aurait Hortense et la mère dévastée en est certaine, c’est sa fille qui est revenue, qui habite en face. Elle va la récupérer.

 

« Il y a seulement la fille, sous mes yeux, qui vient d’emménager en face. Ça fait deux fois que j’en suis sûre. Deux fois, c’est bien. Tout à l’heure déjà, j’ai reconnu son port de tête, sa course, ses cheveux. Le tableau vivant n’est pas seulement ressemblant, il est d’abord troublant, puis absolument vrai. Et alors ? » (p. 10/153 en numérique)

 

Et là se déroule le talent de Claire Castillon, de nous emporter dans la folie de cette mère, toujours plus loin, toujours plus vraie, on doute, on y croit, on comprend les dégâts psychologiques irréversibles que causent le deuil d’un enfant et l’absence de réponse, et puis petit à petit, un pressentiment s’insinue… la fin surprendra ceux qui ne l’auront pas vu venir, et confirmera aux autres (dont je fus, j’ai pensé à Tom est mort de Marie Darrieussecq (P.O.L, 2007) tout du long), que l’autrice est brillante dans son analyse psychologique, glaçante jusqu’à la dernière ligne. Cette fin qui remet l’ensemble en perspective et donne une nouvelle clé à la lecture.

 

Bref mais efficace.

 

 

 

Gallimard, janvier 2020, 176 pages, prix : 16 €, ISBN : 978-2-07-284043-2

 

 

 

Crédit photo couverture : © éd. Gallimard.

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La fille à ma place - Catherine Le Goff

5 Février 2020, 17:45pm

Publié par Laure

Nin vient de tuer la maitresse de son amoureux, elle est en cavale et trouve refuge chez son père qu’elle n’a pas vu depuis des années. Elle retrouve sa jumelle Anna qu’elle n’a quasiment jamais connue, car à la séparation de leurs parents, ils s’étaient partagé la garde des filles.

 

Entre Italie, France et États-Unis, Nin va tenter de refaire sa vie et d’échapper à ses poursuivants. Nombreux sont les rebondissements, hélas tous si dramatiques et improbables qu’ils en deviennent parfois grotesques. Il faut accepter de fermer les yeux sur les invraisemblances, dommage car il y a pas mal de bonnes idées dans ce roman mais l’accumulation m’a un peu gênée. J’ai parfois eu l’impression de lire un roman auto-édité confus auquel il aurait manqué un travail éditorial de cohérence et d’ensemble. De même j’ai parfois été perdue dans la temporalité, notamment quand Stein propose à Nin sa maison dans les Hamptons, qu’il n’a pas habité depuis 2001 (p. 92), alors que des années après, Nin a des nouvelles de son père par Zanni « au matin du 28 octobre 2001 » (p. 137), or ça ne colle pas dans l’histoire où la scène se déroule bien des années après (ou alors je n’ai vraiment rien compris).

 

J’ai trouvé intéressants les personnages d’Anna (que j’aurais aimé voir creusé davantage) et de Natsuo, les relations complexes des membres de cette famille par les choix de vie faits ou subis, et si l’on avance avec plaisir dans l’histoire, on est très loin du mot « thriller » annoncé sur la couverture. Intrigue familiale et parfois sentimentale, plutôt. Trop de maladresses à mon goût, malgré une trame qui aurait pu conduire au meilleur, à condition de moins charger la barque des drames familiaux dont est victime l’héroïne.

 

 

Éditions Favre, janvier 2020, 191 pages, prix : 17 €, ISBN : 978-2-8289-1816-3

 

 

Crédit photo couverture : © éd. Favre.

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Le petit garçon qui voulait être Mary Poppins – Alejandro Palomas

13 Janvier 2020, 11:01am

Publié par Laure

Traduit de l’espagnol par Vanessa Capieu

 

Guillermo, le plus souvent appelé Guille, a 9 ans et une imagination débordante. A son institutrice il répond lors d’un exercice qu’il voudrait plus tard être Mary Poppins, parce que son mot magique supercalifragilisticexpialidocious peut changer la vie. Ses dessins, riches de détails, sont surprenants et alertent son enseignante. Le petit garçon semble heureux dans son monde imaginaire, mais cette attitude cache-t-elle quelque chose ? le père, convoqué, se referme sur lui-même et refuse le dialogue. Il n’apprécie guère les jeux « féminins » de son fils. Et cette maman disparue, en voyage longue durée pour le travail, qu’en est-il réellement ?

 

C’est à travers un roman choral qui donne la parole tantôt au petit garçon tantôt à la psychologue scolaire, à l’enseignante, ou encore au père que le fil de l’intrigue se dénouera.

 

Si le lecteur comprend assez vite l’enjeu du roman (et la raison de l’absence maternelle), la réussite du roman tient dans son cheminement, sa douceur, sa bienveillance, son attention à l’autre, et l’expression des émotions de chacun. Le roman fait également un pas de côté en évoquant le mariage forcé dans d’autres cultures à travers le personnage de la petite Nazia, qui ne pourra participer au spectacle final et jouer le fameux rôle de Mary Poppins, pour des raisons dramatiques.

 

Sans être un grand roman, un hijo (de son titre original que je trouve plus adapté) offre un agréable moment de lecture, qui émeut sans être larmoyant. Une réussite.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cherche-Midi, janvier 2020, 224 pages, prix : 20 €, ISBN : 978-2-7491-5863-1

 

 

 

Crédit photo couverture : © éd Le Cherche Midi

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Le consentement – Vanessa Springora

9 Janvier 2020, 17:01pm

Publié par Laure

Le consentement est le récit autobiographique de V. dans sa relation amoureuse avec G, alors qu’elle avait 14 ans en 1986, et qu’il en avait déjà plus de 50.

 

La presse et les médias font le reste aujourd’hui : ils ont mis des noms sur V. et G, et dénoncé des actes qui vont à l’encontre de la loi. A l’époque tout le monde savait. Mais personne n'a rien dit. Depuis #MeToo la parole des femmes s’est libérée et c’est tant mieux. Mais…

 

Grasset (ou tout autre éditeur) s’engage-t-il désormais à publier tous les récits de toutes les femmes victimes de violences, sexuelles, physiques ou psychologiques ? ça va en faire du monde sur les tables des libraires. Accordera-t-il la même valeur à toutes les paroles de toutes les femmes ?

 

N’y a-t-il pas un opportunisme malsain à sortir aujourd’hui une affaire qui aurait dû se régler depuis bien longtemps devant les tribunaux et dans le cabinet d’un psychothérapeute ? Pourquoi aujourd’hui ? Pourquoi mettre des noms là où Vanessa Springora n’en met pas ?

 

Les présentateurs télé et les éditeurs font aujourd’hui leur mea culpa. Et avant ? Ils étaient aveugles sourds et muets ? Aveuglés par un monde artistique parisianiste à vomir ?

 

On lit ici ou là que Vanessa Springora est courageuse et que son récit a ceci de plus qu’il a une vraie qualité littéraire. Rien qui se remarque en tout cas. Ce n’est pas mal écrit, ça ne se distingue pas non plus. La littérature a bon dos. N’est-ce pas déjà ce que l’on disait au moment des faits quand on voulait fermer les yeux sur le contenu des livres et journaux de G. ?

 

Vanessa Springora ainsi que son éditeur ont-ils émis le souhait de verser leurs droits d’auteur et bénéfices à des associations de protection de l’enfance ou de femmes ? Ce serait louable mais je n’ai à ce jour rien lu ou entendu dans ce sens.

 

Quant au contenu du livre, tout est dit dans la presse, les passages glauques ou sulfureux sont cités dans les meilleures feuilles, l’extrait de l’émission de Pivot où la canadienne Denise Bombardier est la seule à s’émouvoir de la situation tourne en boucle sur le net (et le passage est bien dans le livre), vous pouvez économiser 18 €.

 

J’ai voulu me faire mon propre avis. Eh bien je ne comprends toujours pas les raisons qui ont conduit à cette publication. Je souhaite juste que tout autre victime de n’importe quel autre prédateur sexuel puisse s’exprimer de la même façon, qu’on lui donne les mêmes moyens de le faire, y compris et surtout si elle n’est ni éditrice ni parisienne.

 

Extraits :

p.5/150 (numérique) : « Depuis tant d’années, je tourne en rond dans ma cage, mes rêves sont peuplés de meurtre et de vengeance. Jusqu’au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence. : prendre le chasseur à son propre piège, l’enfermer dans un livre. »

 

p. 88/150 (numérique) : « G. n’était pas un homme comme les autres. Il avait fait profession de n’avoir de relations sexuelles qu’avec des filles vierges ou des garçons à peine pubères pour en retracer le récit dans ses livres. Comme il était en train de le faire en s’emparant de ma jeunesse à des fins sexuelles et littéraires. Chaque jour, grâce à moi, il assouvissait une passion réprouvée par la loi, et cette victoire, il la brandirait bientôt triomphalement dans un nouveau roman. »

 

p. 119/150 (numérique) : « Les écrivains sont des gens qui ne gagnent pas toujours à être connus. On aurait tort de croire qu’ils sont comme tout le monde. Ils sont bien pires.

Ce sont des vampires.

C’en est fini, pour moi, de toute velléité littéraire.

J’arrête de tenir mon journal.

Je me détourne des livres.

Plus jamais je n’envisage d’écrire. »

 

 

 

Grasset, janvier 2020, 216 pages, prix : 18 €, ISBN : 978-2-246-82269-1

 

 

 

Crédit photo couverture : © éd. Grasset

 

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