La véritable histoire de mon père - Nicolas Cauchy
Un homme de cinquante ans, Simon, fuit sa maison et la soirée qui s’y donne au volant d’une Porsche volée à ses amis. Sur le siège arrière, le corps de sa petite fille de 4 ans. Maintenant qu’il a commis l’irréparable, il hésite à se foutre en l’air contre un platane, mais…
Il se remémore les moments partagés avec sa fille, moments si rares, cet amour paternel aussi violent que soudain, lui l’accro du boulot qui a toujours pensé qu’assurer un bien-être matériel à sa famille suffisait. Malgré ce personnage qui ne dégage aucune empathie, ça y est, le lecteur est happé, il ne peut s’empêcher de vouloir aller de l’avant pour comprendre comment ce père en est arrivé là.
Dès le départ, une obsession malsaine se dégage du récit : il a une fille plus grande, Hélène, d’un premier mariage ; une fille qu’il n’aime pas. Elle lui raconte froidement le viol dont elle a été victime et lui reste parfaitement indifférent, se demandant seulement si elle fabule ou pas. On ne peut pas aimer ce personnage et pourtant on ne peut pas s’empêcher d’avancer : ce livre est aussi dérangeant que fascinant !
La vrai problème de cet homme ne serait-il pas dans son incapacité à vivre ses émotions ou écouter ses sentiments ? p. 72 : « au plus profond de vous, vous êtes incapable de gérer des émotions. Vous savez bien que c’est un piège. Pas de Nathalie, bien sûr que non, votre femme ne vous tendrait jamais de piège. Mais de la part d’Hélène que vous n’aimez pas. C’est une cause entendue, vous ne l’aimez pas. Oh, bien sûr, avec vous, tout reste dans le non-dit. Jamais vous n’exprimeriez un sentiment pareil, jamais vous n’exprimez de sentiment tout court. Plutôt que d’avoir à lui parler, plutôt que d’avoir à la regarder, vous lui tournez le dos. Votre dos, la seule chose qu’elle connaît de vous ». Ce passage qui définit si justement le personnage est terrible. C’est un roman d’une implacable froideur, aux descriptions méticuleuses, « un roman noir, précis, implacable », comme le dit avec exactitude la quatrième de couverture.
Puis la fin, inattendue, qui fait reconsidérer complètement le point de vue, et douter alors de ces sentiments ambivalents que le lecteur a pu éprouver. Et si ce point de vue du coup faussait tout ? Où est la vérité ? Où est la folie ?
Nicolas Cauchy a un talent certain dans cette écriture-là, une façon agaçante de manipuler son lecteur pour l’amener à lire son histoire pourtant si sombre au personnage qu’on voudrait haïr, et c’est bien cette écriture qui rachète les quelques maladresses qu’on trouve par ailleurs dans le récit : l’engouement de la fillette de 4 ans pour le Louvre, on y croit moyen, l’épisode de la maîtresse, bof, n’apporte pas grand-chose …
Aparté : je remercie l’auteur qui m’a gentiment prêté son livre, me demandant simplement de le lui rendre en y laissant une marque personnelle : un mot, une phrase, un dessin. Me voilà bien embarrassée, c’est sacrilège d’écrire dans les livres, Monsieur Cauchy. Du moins pour moi. Mais après tout c’est le vôtre, hein. Je réfléchis à la trace que je vais y laisser… mais vous m’embarrassez, la lectrice que je suis ne peut écrire qu’une fade banalité sur les mots que vous avez construits, c’est vous l’écrivain, pas moi….
Pour ceux qui veulent en savoir plus :
Sur cette expérience de marketing direct : le blog de l’auteur
Le site de l'auteur
Une interview de l’auteur sur son livre : là
Robert Laffont, janv.2006, 170 p. ISBN 2-221-10606-7, prix : 16 €
Ma note : 3,5/5