Un hiver à Paris - Jean-Philippe Blondel
(oups, je précise s'il était besoin, que j'ai pris cette photo avant de lire le roman, et qu'il y avait encore sur la table du réveillon quelques cadeaux égarés, l'étudiante en médecine de la maison a laissé un squelette qui a bien animé nos soirées, il ne s'agit en aucun cas d'une mise en scène macabre du roman, je réalise après coup que cela pourrait être interprété comme étant de très mauvais goût. J'aurais mieux fait de continuer à piquer mes photos de couv sur a***)
Un hiver à Paris est le premier roman que je lis en ce début d'année 2015. Pas le premier que j'ai commencé, mais le premier que j'ai achevé.
Je suis une fidèle des romans de Jean-Philippe Blondel, la faute au web 2.0 sans doute, depuis le début des années 2000 où la muraille entre auteurs et lecteurs s'est amenuisée et a facilité les échanges.
J'aime sa façon de décrire les sentiments intérieurs avec l'air de ne pas y toucher, et sa capacité à toucher à l'universalité à partir d'une intimité individuelle.
Victor est un étudiant en classe préparatoire littéraire à Paris. Après une première année chaotique et solitaire (provincial et d'une famille modeste, il n'a pas les codes sociaux et culturels de ces grands établissements élitistes et renommés), il commence sa khâgne, sans pour autant avoir l'ambition du St Graal qu'est la réussite au concours d'entrée à l'ENS.
Il commence enfin à échanger quelques mots et quelques cigarettes avec un camarade, Mathieu Lestaing, qui quelques jours plus tard, se suicide dans l'établissement. Dès lors tout va changer pour Victor : il devient « l'ami » du défunt et la curiosité et l'intérêt se tournent désormais vers lui. Il est invité à des soirées, et surtout, il répond à la demande du père de Mathieu, Patrick Lestaing, qui cherche à revivre par procuration les derniers moments de son fils, qui cherche dans un autre fils l'absence insupportable du sien. Étonnante relation qui va en déranger plus d'un, alors que tous deux semblent avoir besoin l'un de l'autre...
Malheureusement et en dépit d'un thème qui aurait pu me toucher, je n'ai pas réussi à avoir de l'empathie pour les personnages. Une lecture qui a glissé sur moi sans m'atteindre, sauf dans sa toute fin, bien sûr j'y ai relevé quelques beaux passages, mais c'est comme si le sort de Victor ne m'avait jamais vraiment concernée, alors que dans Et rester vivant par exemple, j'avais pleuré comme une madeleine tout du long alors que rien non plus ne ressemblait à ma propre vie ...
Néanmoins ce livre m'a touchée bien plus que je ne veux le croire, pas là où je l'attendais, mais dans sa fin qui remet en perspective l'ensemble du texte, Blondel n'est pas juste un raconteur d'histoire, au-delà, ce sont les 30 ans qui se sont écoulés entre cette année 1984 et cet aboutissement dans l'écriture romanesque aujourd'hui réalisée, de cette voie ouverte et saisie il y a 30 ans (ah la dissertation de concours!) à cette vérité : « C'est le propre du roman d'amener le lecteur à renoncer au sommeil » (p. 261). C'est le désir secret de tout lecteur, je crois.
Je garde la fin, précieuse, comme des pages à relire, même si ce titre-là n'est pas celui qui m'a fait passer une nuit blanche. Mais je perçois le tournant qu'il a été dans le destin de « Victor ».
Buchet-Chastel, janvier 2015, 267 pages, prix : 15 €
Crédit photo couverture © Michael Cogliantry / photonica Getty Images / et éd. Buchet-Chastel