Les jardins d'Hélène

Banquises - Valentine Goby

7 Février 2012, 16:03pm

Publié par Laure

banquises.jpgVingt huit ans après la disparition de sa sœur aînée au Groenland, Lisa prend l’avion pour cette même destination, pour peut-être enfin mettre un terme à cette situation restée ouverte et ces recherches vaines mais pour d’abord se libérer elle-même de vingt huit années d’emprisonnement intérieur.

Sarah avait 22 ans quand elle a disparu, en 1982, nul ne sait ce qui lui est arrivé, les recherches n‘ont rien donné d’autre qu’un sac à dos trouvé sur un bateau. Bien sûr ses parents se sont effondrés, sa mère en particulier ne s’en est jamais remise. Lisa, adolescente à l’époque, est devenue transparente aux yeux de sa mère.

Voyage sur la banquise, description de paysages en destruction à cause du réchauffement climatique, nature souveraine, les scènes à Uummannaq sont des épreuves fortes, qui font découvrir un pays finalement peu connu, mais ce qui m’a semblé essentiel dans ce roman, ce sont les flashback qui reviennent sur la vie familiale après la disparition de Sarah, et l’impossible deuil pour les parents (il n’y a pas de corps, et elle était majeure, il n’est pas interdit de changer de vie), l’enfermement obsessionnel de la mère dans l’espoir si mince, la position du père, qui ne peut rien pour sa femme, et Lisa, qui ne semble plus exister pour personne. Jusqu’à la fin du voyage sans réponse mais qui permettra enfin la renaissance à soi-même de Lisa, les pensées de la mère resteront frappantes pour le lecteur.

Un voyage qui sonde des pistes mais sans donner toutes les réponses, qui  fait découvrir un pays tout en laissant le lecteur sur sa faim, une écriture qui parfois pâtit de quelques longueurs, c’est le voyage intérieur qui m’a plus touchée que le voyage réel, et qui pour moi garde un goût d’inachèvement, même si l’histoire s’achève bel et bien, sur la voix de Lisa.

 

Extrait p.118-119 : « Le père a besoin de sa femme. Terrible comme il a besoin d’elle, de moins en moins femme, de plus en plus mère. Il voudrait être elle. Pouvoir lui aussi situer la douleur quelque part. Elle c’est le ventre. Lui c’est diffus, partout, autant dire nulle part. Il a besoin du ventre de sa femme. Il voudrait qu’elle le prenne en elle, qu’elle l’absorbe dans ses muqueuses tièdes. Il voudrait jouir dans ce ventre presque sans bouger, presque sans effort, y déverser toute la souffrance qui n’a pas de lieu en lui, déverser l’amour et la peur, et la serrer, cette femme, et qu’elle le serre, dans ses bras, dans sa peau chaude, qu’elle l’enlace, se contracte autour de son sexe même devenu mou, vieux, son sexe son ventre, qu’elle accomplisse encore le pacte primitif. Seulement c’est étroit. C’est occupé. Par la fille absente, par le réenfantement de la fille » © Valentine Goby.

 

Albin Michel, août 2011, 246 pages, prix :18 €

Existe en numérique au prix de 13.99€

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Crédit photo couverture : © éd. Albin Michel.

 

 

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Au pays des kangourous - Gilles Paris

1 Février 2012, 17:48pm

Publié par Laure

au-pays-des-kangourous.jpgSimon a neuf ans lorsqu’il découvre un matin son papa recroquevillé dans le lave-vaisselle. Situation inhabituelle s’il en est ! Son père est écrivain (il écrit surtout des livres pour les autres), et sa mère travaille chez Danone, mais elle est très souvent en voyage, à l’autre bout du monde, à Sydney notamment, Australie. Le pays des kangourous.

Le père de Simon traverse une mauvaise passe, dépression aiguë, qui nécessite de l’hospitaliser. C’est la grand-mère Lola, libre et fantasque, qui va s’occuper de Simon, qui se pose beaucoup de questions sur la maladie de son papa, les absences de sa mère, leur amour. Le petit garçon va trouver beaucoup de réconfort auprès de Lily, une enfant qu’il rencontre régulièrement à l’hôpital, et qui lui apprend plein de choses sur la maladie de son papa, tout simplement ce que les adultes ne lui disent pas.

            J’ai aimé l’idée que pour une fois, ce soit le père qui soit dans une situation de dépression profonde, et la mère obnubilée par son travail, très peu présente, assez peu maternelle, ça fait du bien de temps en temps de voir ces rôles habituels inversés ! Si j’ai aimé le ton du livre, le point de vue de l’enfant, la vivacité des personnages qui l’entourent (Lily, sa grand-mère Lola), j’ai trouvé toutefois que le rythme était un peu lent, qu’on commençait à tournait un peu en rond (peut-être la traduction de l’enlisement profond du père dans la maladie ?), jusqu’à une révélation inattendue qui redonne un nouveau sens à l’ensemble. Si la fin est quelque peu convenue, elle fait tout simplement du bien au lecteur, et plus j’approchais de la fin, plus je l’aimais finalement ce roman, d’autant que le personnage de Lily devient de plus en plus intrigant ! Un roman positif et pas triste du tout, le sujet ne doit surtout pas vous faire peur !

 

Gilles Paris est également l’auteur de deux autres romans plus anciens : Autobiographie d’une courgette (en 2002, je ne retrouve pas de billet mais j’avais beaucoup aimé !) et Papa et maman sont morts (1991, que je ne connais pas mais que du coup j’ai envie de découvrir). Et je n’ai réalisé qu’en fin de lecture, en lisant que l’auteur travaillait dans le monde de l’édition, que j'avais été en contact avec lui il y a quelques années lors d’un accueil d’auteur. Je n’avais jamais fait le rapprochement avec les mails d'info que je reçois toujours, ou j’avais pensé à une homonymie, il faut croire que je n’imagine pas les auteurs faire autre chose qu’écrire J

 

Une interview de l’auteur sur Libfly

  

Don Quichotte, janvier 2012, 247 pages, prix : 18 €

Existe en numérique (différents formats selon librairies et liseuses) au prix de 12,99 €

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Crédit photo couverture : © Olivier Balez et éd. Don Quichotte

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