Rose - Tatiana de Rosnay
Traduit de l'anglais par Raymond Clarinard
1868 à Paris. Rose prend la plume pour écrire une longue lettre à son époux Armand, décédé dix ans auparavant. Elle se terre dans leur maison tant aimée de la rue Childebert, maison vouée à la destruction du fait des travaux d'embellissement de Paris par le baron Haussmann, préfet de la ville sous Napoléon III, qui a la folie des grandeurs et des grands boulevards. Les actes d'expropriation et les dédommagements financiers n'y changeront rien : Rose ne veut pas quitter sa maison.
Mais avant que les travaux de destruction ne commencent, elle doit se confier à Armand, lui confesser ce lourd secret qu'elle n'a pas eu la force de lui révéler de son vivant. Mais sa longue lettre est aussi l'occasion de revisiter leur bonheur, leur rencontre, la naissance de leurs enfants, la difficulté que Rose a à aimer de manière égale ses deux enfants, sa belle-mère Odette qui l'aime comme sa fille, les amis qui lui sont chers et qui l'ont soutenue à la mort d'Armand : Alexandrine, la fleuriste, M. Zamaretti le libraire, la comtesse de Vresse ; et de découvrir une page méconnue de l'histoire sur l'évolution de Paris.
Si j'avais des doutes sur ma capacité à apprécier un roman historique (ce n'est pas ma tasse de thé), j'ai vite oublié mes craintes pour me laisser emporter par ce roman à l'écart de la frénésie moderne, au charme légèrement suranné, où la lenteur de la plume conduit le rythme. Tatiana de Rosnay sait à merveille raconter une histoire et vous faire vivre avec ses personnages. On croirait sentir le parfum des roses et des fleurs de la boutique d'Alexandrine, revivre l'amitié de ces deux femmes si différentes, balayer la poussière des travaux incessants et démesurés, qui ont fait de Paris ce qu'elle est aujourd'hui.
p. 52 « Comment pourrais-je jamais quitter cette maison, mon amour ? Cette haute maison carrée, c'est ma vie. Chaque pièce a une histoire à raconter. Retranscrire l'histoire de ce lieu sur le papier est devenu un besoin terrible, irrépressible. Je veux écrire afin que nous ne soyons pas oubliés. Oui, nous les Bazelet de la rue Childebert. Nous avons vécu ici, et en dépit des embûches que le sort nous a réservées, nous y avons été heureux. Et personne, écoutez-moi bien, personne ne pourra jamais nous l'ôter. »
p. 88 : « Le préfet et l'empereur rêvaient d'une cité moderne. Une très grande cité. Et nous le peuple de Paris, n'étions que des pions dans cette gigantesque partie d'échecs. »
J'ai aimé :
- le roman épistolaire au long cours
- la parenthèse hors du temps, j'ai vécu dans une bulle quelques heures avec les personnages
- la fin, assumée et sans équivoque (j'ai horreur des fins ouvertes où le lecteur doit imaginer ce qu'il veut et de préférence le meilleur), je me demandais sincèrement jusqu'où irait l'auteur, si il y aurait un revirement ou pas. La tension allait croissant, vraiment ! Non seulement j'ai eu la réponse que j'imaginais, mais avec une surprise en plus.
J'ai un doute :
- sur le secret confessé, enfin pas tant sur le secret lui-même que sur les conséquences qu'il a eu sur la vie de Rose, j'ai un peu de mal à y adhérer, même si elle s'en justifie au détour d'une phrase. (C'est énigmatique mais je ne veux pas trop en dévoiler)
Nul doute que Rose séduira son lectorat !
A lire : l'article de Véronique B. sur le blog de Cultura
A voir : la vidéo de Tatiana qui présente son roman :
Ed. Héloïse d’Ormesson, mars 2011, 247 pages, prix : 19 €
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Crédit photo couverture : © Cédric Porchez et éd. Héloïse d'Ormesson.