Comme neige - Colombe Boncenne
Constantin Caillaud, comptable dans une imprimerie, est aussi un lecteur aguerri (ses enfants se prénomment Aurélien et Emma, c'est dire...), grand admirateur de l’œuvre d’Émilien Petit, dont il a tout lu, sur le conseil notamment de sa maîtresse Hélène. Aussi est-il surpris et fébrile lorsqu'il découvre dans une maison de la presse de Crux-la-Ville, dans un bac de livres soldés, un roman de son écrivain fétiche, qu'il ne connaît pas : Neige noire. Il l'achète et le dévore.
A son retour chez lui, il veut en parler à sa maîtresse, mais il est incapable de remettre la main sur le livre, perdu, oublié lors du séjour ? Cette dernière ne le croit pas. Commence alors une enquête sur ce livre fantôme, au cours de laquelle Constantin tentera toutes les pistes possibles : l'auteur vit reclus et ne répond à rien ni personne (tiens, tiens... ça nous rappelle quelqu'un), et les attachée de presse et éditeur lui confirment que ce livre n'a jamais existé.
Folie ? Absurdité ? Constantin pense trouver la clé du mystère dans l’œuvre même de Petit, et il n'hésitera pas à questionner des amis de l'auteur : Jean-Philippe Toussaint, Olivier Rolin et Antoine Volodine, tous trois écrivains dans la vraie vie.
Le lecteur se délecte de ce jeu littéraire et se demande bien qu'elle va en être l'issue. Pour ma part je croyais réellement que Colombe Boncenne, dans ce premier roman très bien conduit, avait joué de la fiction en inventant des lettres écrites par ces vrais écrivains, avec je l'imaginais, leur accord pour les citer nommément. Mais c'est en écoutant une émission littéraire sur France Culture que j'ai découvert qu'Olivier Rolin avait réellement écrit ces lettres (j'imagine donc que les autres auteurs aussi). De même on y trouve des articles de presse écrits par Patrick Kéchichian du Monde, et Edouard Launet de Libération... Colombe Boncenne s'amuse avec malice à perdre (ou du moins promener) son lecteur entre fiction et réalité. Mais d'ailleurs, dans ce roman « Neige noire », n'y avait-il pas des éléments qui ressemblaient de manière troublante à la vie de Constantin, partagé entre ses deux femmes, Suzanne, et Hélène, sa maîtresse ?
Il y a sans doute du Borges derrière tout cela (Le jardin aux sentiers qui bifurquent) et à défaut de connaître, j'aime cette nouvelle curiosité que l'auteure suscite en moi.
Un premier roman prenant et étonnant, qui rend un bel hommage à la littérature et qui se joue, en douceur, du milieu de l'édition.
À découvrir !
Buchet-Chastel, coll. Qui Vive, janvier 2016, 115 pages, prix : 11 €
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Crédit photo couverture : © éd. Buchet-Chastel