Café sans filtre - Jean-Philippe Blondel
C’est sans doute le premier roman post covid que je lis qui aborde de biais la période des confinements et leurs sorties par la réouverture des cafés, réouverture sur la vie, le monde, les interactions sociales comme on dit.
Dans ce café de province, le Tom’s, en intérieur ou en terrasse, se succèdent quelques personnages, de passage ou habitués comme Chloé qui vient désormais y dessiner toute la journée, mais aussi le patron, son employé, la propriétaire précédente.
On retrouve avec bonheur ces tranches de vie dans lesquelles Blondel excelle quand il s’agit d’aborder l’intime ; certains personnages sont plus touchants que d’autres, chacun y verra une résonance personnelle avec l’un plus qu’un autre, mais tous sont à un moment de croisement, de changement dans leur vie, amoureuse, professionnelle, tous nous ouvrent leurs souvenirs ou le pourquoi de leur état présent.
J’ai aimé Chloé, Guillaume et surtout sa mère Françoise, Thibault et Pierre (doubles de l’auteur ?), quand Jocelyne, Fabrice et José m’ont laissée indifférente.
Que vous avaliez ce café en terrasse ou le dégustiez sur une chaise longue au soleil, ou encore sous un plaid avec une tasse de thé au fond du canapé, vous y retrouverez le Blondel des bons moments (il s’était un peu égaré à mon goût ces dernières années), celui des petits riens et des amours passées, une douce nostalgie et un sourire au coin des lèvres aujourd’hui.
Et je ne peux que citer ce passage :
p. 150 « C’est toujours difficile de donner un avis sur l’œuvre de quelqu’un quand on le connaît. Tout est biaisé (…) »
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p. 19/20 : "Je faisais défiler les photos de la vie des autres sur Instagram et sur Facebook. J'ai de la tendresse pour Facebook, ce réseau pour vieux qui se persuadent qu'ils peuvent rivaliser avec la jeunesse. Tous ces gens qui prennent en photo les plats qu'ils ont commandés et qui écrivent "miam" suivis de quatre points d'exclamation. Toutes ces citations, dont la moitié sont fausses, accompagnées de réflexions sur le sens de l'existence. C'est à peu près l'équivalent des romans-photos en noir et blanc que lisait ma grand-mère dans Modes de Paris"
L'Iconoclaste, avril 2022, 283 pages, prix : 20 €, ISBN : 978-2-37880-284-4
Crédit photo couverture : Quintin Leeds - illustration Pierre-Emmanuel Lyet - et éd. L'Iconoclaste