Comment devenir un brillant écrivain alors que rien (mais rien) ne vous y prédispose – Aloysius Chabossot
Aloysius Chabossot tient un blog a
priori pas mal du tout, mais que j’avoue honteusement ne pas lire. Chabossot se présente comme un professeur émérite à la retraite, âgé de 58 ans, binocles et grande barbe grise. C’est bien sûr
un canular. Le problème, c’est qu’une fois qu’on a fini ce bouquin, on se demande réellement qui se cache derrière ce pseudo, en tout cas quelqu’un qui connaît à merveille littérature et monde de
l’édition.
J’ai triché, j’ai emprunté son livre en bibliothèque municipale : il dit lui-même que ça ne compte pas, il faut l’acheter ! Au début de ma lecture, c’était pas gagné, je trouvais qu’il en faisait un peu trop côté humour. Et puis à vrai dire je ne me sens pas concernée par ce bouquin non plus, puisque je n’écris pas, et ne cherche donc pas à être publiée (je me satisfais très bien d’être lectrice !), mais comme je m’intéresse à la création littéraire et à ses dessous, c’était une curiosité tentante.
Pour ce qui est des règles d’écriture, des conseils pour trouver un éditeur, bref, tout ce qui peut vous aider à réussir votre rêve, je n’ai rien appris, j’ai suivi suffisamment de formations en métiers du livre pour connaître un peu tout cela. Et puis c’est souvent question de bon sens : si vous écrivez du polar, vous n’allez pas adresser votre manuscrit à un éditeur de poésie, et si vous n’avez jamais lu un livre de votre vie, vous êtes un peu mal barré. En revanche, plus j’avançais dans ma lecture et plus j’y trouvais du plaisir, et ça, c’est la bonne cerise sur le gâteau. Mention particulière pour les deuxième et troisième parties sur les différents genres littéraires et la construction romanesque, qui relèvent davantage de l’analyse et de la critique littéraire, mais en langage clair !
Et puis je l’avoue, je partage les mêmes points de vue que Chabossot du début à la fin, même si on peut finir par considérer comme un peu facile de toujours tirer sur Lévy et Musso. (N’empêche qu’il a raison dans sa façon de le dire et en plus c’est drôle, tout comme l’on voit très vite ses partis pris en matière d’éditeurs, et je ne parle là que des grandes maisons parisiennes connues). Car il ajoute en annexe en fin d’ouvrage un contrat de maison à compte d’auteur, où franchement, il faut le lire pour le croire ! (Rien que pour cela, il faut lire ce bouquin !)
Et puis, et puis… ce qui m’a rendu ce Chabossot sympathique, c’est qu’il semble être copain avec Blondel (Jean-Philippe). Car citer Blondel dans les procédés stylistiques alors qu’il y a sans doute des milliers d’autres exemples, J , et à la fin, les deux compères déjeunent ensemble, et Chabossot nous en remet une couche sur Blondel et on apprend plein de choses qui illustrent à merveille le livre : il faut parfois essayer pendant plus de 20 ans avant d’être publié, ce qui, plumitifs en herbe, vous laisse encore le temps de voir venir.
Du coup, on s’interroge vraiment sur l’identité de ce Chabossot. Il est presque né le même jour que Blondel, un an plus tôt : un écrivain ami ? Ce cher Chabossot a donc 45 ans, et non 58 comme il veut nous le faire croire. (Oui je commence à être une lectrice aguerrie et je sais utiliser les ressources à ma disposition !)
Tout ça pour dire qu’au final, cette « méthode Chabossot » (comme le précise le bandeau de couverture) sera sans doute utile à tous les écrivains en devenir et qui y croient, mais qui sont encore peu au fait des pratiques de l’édition, et pour tous les autres comme moi, il offrira un bon moment de lecture, et franchement, mieux vaut lire cette amusante méthode qu’un mauvais roman !
Je vous laisse avec le pacte de lecture :
p.87-88 : « Le seul fait d’entreprendre la lecture d’un roman sous-entend de la part du lecteur l’acceptation tacite du pacte que lui propose l’auteur. Que dit ce pacte ?
« L’auteur X s’engage à raconter une histoire au lecteur Z afin de le distraire, l’amuser, l’amener à réfléchir, l’effrayer, l’exciter, l’émouvoir, flatter son sens esthétique (rayer les mentions inutiles, plusieurs réponses sont possibles). De plus, il mettra tout en œuvre pour que le lecteur apporte suffisamment de crédit à cette histoire afin qu’elle soit vraisemblable, dans un univers donné. En échange de quoi, le lecteur Z s’engage à croire ce que lui raconte l’auteur X. »
On le voit, les obligations du lecteur, comparées à celles de l’auteur, sont tout à fait raisonnables. C’est un peu normal : il a payé, il ne va tout de même pas se farcir tout le boulot. Pourtant, bon nombre d’écrivains en devenir ignorent jusqu’à l’existence de ce pacte. En conséquence, ils s’autorisent à raconter n’importe quoi (…) »
Ed. Milan, janvier 2008, 265 pages, prix : 14 €
Ma note :
Crédit photo couverture : éd. Milan.
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Frisette 30/12/2008 05:56
jp 19/12/2008 20:55
Laure 19/12/2008 21:39
Philippe 12/12/2008 16:13
Laure 12/12/2008 20:41
Karine :) 12/12/2008 03:51