Deux amours cruelles - Junichiro Tanizaki
Ce recueil comprend deux nouvelles : l’histoire de Shunkin, et Ashikari, une coupe dans les roseaux, qui dateraient respectivement de 1933 et 1932.
Ma première réaction est que j’ai perdu l’habitude de lire des classiques, et qui plus est de la littérature japonaise. Je découvre alors un univers si éloigné de notre pensée occidentale que j’en suis un peu chamboulée, malgré toute l’élégance et la retenue dont l’écriture asiatique fait preuve ici. Je reste trop à l’écart, comme si la réserve de l’auteur me tenait à distance.
Dans la première nouvelle, l’histoire de Shunkin, donc, il est question d’une jeune femme, Shunkin, de son vrai nom Koto Mozuya, fille de riches apothicaires, qui devient aveugle à 9 ans. Elle devient professeur de musique à la façon des grands maîtres, avec exigence, rigueur… et violence. Sasuke, son serviteur, deviendra son élève et son amant, et ils s’aimeront toute leur vie durant, sans manifestation extérieure aucune. A tel point que lorsque Shunkin sera défigurée au visage, Sasuke se crèvera les yeux pour ne pas lui faire l’affront de la voir moins belle. Lors de sa première grossesse, elle refusera de donner le nom de son amant, car il n’est pas de la même condition sociale. Ils auront d’autres enfants mais cela passe au détour d’une phrase, ce n’est pas l’objet du livre. Difficile pour moi lectrice d’imaginer une vie commune autre que celle de la relation de maître à élève ! La nouvelle porte plus sur le caractère cruel, indigne et violent de Shunkin, et le dévouement à toute épreuve de Sasuke.
La seconde nouvelle, Ashikari, m’a demandé plus d’effort pour entrer réellement dans le récit. Oyu est une jeune veuve qui n’a pas le droit de se remarier car elle doit élever son enfant, aussi quand Serizawa tombe amoureux d’elle (et vice-versa), il n’est pas possible de les réunir dans le bonheur. Elle persuade sa jeune sœur Oshizu d’épouser Serizawa, afin de ne pas le perdre de vue et de l’aimer comme un frère. Là aussi le dévouement d’Oshizu ira très loin.
J’avais repéré ce livre sur le blog de Christie il me semble, et depuis ma lecture je n’en trouve plus trace : dommage ! (Mais peut-être est-il encore dans son mûrissoir !) La littérature japonaise est un univers à part entière qui mérite d’être exploité, et qui m’a permis de réaliser que j’étais trop enfermée dans la mixture française contemporaine. C’est bien d’en sortir de temps en temps, mais on pourrait en dire autant de toutes les littératures, ah ! que c’est difficile de vouloir tout lire !
Traduit du japonais par Kikou Yamata.
Préface de Henry Miller.
Stock, sept.2002, 159 pages, ISBN 2-234-5512-6, prix : 7,50 € Ma note : 3/5