Les jardins d'Hélène

Soixante printemps en hiver – De Jongh / Chabbert

23 Août 2022, 18:20pm

Publié par Laure

Scénario : Ingrid Chabbert, dessin : Aimée de Jongh

 

Le jour de ses 60 ans, Josy plante gâteau et famille et fuit au volant de son vieux combi Voslkswagen, étouffée par cette vie morne et routinière qui ne lui convient plus. Elle laisse mari et enfants dans l’incompréhension.

Elle va faire la rencontre de la pétillante Camélia et de son petit garçon, qui vivent en caravane sur un parking ; De fil en aiguille elle va fréquenter le CVL, Club des vilaines libérées, des femmes qui comme elles ont eu besoin d’un nouveau souffle.

Ne plus se contenter de faux-semblants, penser enfin à soi et oser, une nouvelle vie, de nouvelles rencontres, un nouvel amour, c’est une tranche de vie sensible et délicatement colorée (je parle là du dessin) qu’offre cet album. Un album feel-good qui requestionne la fidélité à soi-même après l’abnégation, non la vie n’est pas finie à soixante ans !

 

 

Ed. Dupuis, coll. Aire Libre, 110 pages, prix : 23 €, ISBN : 979-1-0347-4737-5

 

 

Crédit photo couverture : © Aimée de Jongh et éd. Dupuis

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Le livre des sœurs – Amélie Nothomb

19 Août 2022, 12:33pm

Publié par Laure

Que dire du dernier Nothomb ? C’est Nothomb qui fait du Nothomb ?

Écrit sous forme de conte, c’est l’histoire de deux sœurs qui grandissent dans un amour incommensurable l’une avec l’autre. Tristane (triste ?) est l’ainée, reléguée dans un monde de solitude tant elle ne doit pas déranger ses parents qui vivent un amour fusionnel dans lequel il n’y a pas de place pour des enfants ; elle brille par son intelligence précoce et la fulgurance de ses mots. On sait combien le vocabulaire est la marque de fabrique d’Amélie Nothomb et l’on s’en réjouit. Laëtitia (la joie en latin) est la petite sœur qui grandira avec Tristane pour maman, sœur et amie, c’est d’ailleurs pour elle que ses parents l’ont conçue.

On relèvera quelques passages piquants sur l’éducation et la parentalité, puis on se laissera emporter par l’histoire de ces deux sœurs hors normes et de leur cousine Cosette, dont la mère Bobette est une tante alcoolique et paresseuse, mais qui chérit Tristane, à l’opposé de l’indifférence maternelle.

Bref ça se laisse lire, c’est court, comme toujours chez Nothomb, ça n’a rien de réaliste mais les mots font leur effet, et si l’on sent que ce lien sororal peut faire écho à celui de l’autrice, j’ai trouvé la première partie bien plus réussie que la seconde, que j’ai trouvée plus convenue (pour ne pas dire ennuyeuse) avec une fin un peu expéditive.

Nothomb, on le lit pour le lire - une année sur trois environ pour ma part - par curiosité, parce que c’est vite lu, parce que j’ai aimé ses premiers romans (Les catilinaires, Hygiène de l’assassin, stupeur et tremblements), mais le rythme métronomique annuel, s’il est sa marque de fabrique, la dessert sans aucun doute. Un phénomène plus qu’un bon roman.

 

 

Albin Michel, août 2022, 198 pages, prix : 18,90 €, ISBN : 978-2-226-47636-4

 

 

Crédit photo couverture : © Nikos Aliagas et éd. Albin Michel

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Halimi à la plage – Catherine Valenti et Jean-Yves Le Naour

17 Août 2022, 20:28pm

Publié par Laure

Sous-titre : La femme engagée dans un transat

La collection « A la plage » chez Dunod est une collection de biographies de grands hommes et femmes célèbres, qui prend le parti de la vulgarisation scientifique, historique, politique, etc.

Gisèle Halimi est née en juillet 1927 en Tunisie, sous le nom de Zeïza Taïeb. Gisèle est son deuxième prénom, qu’elle utilisera rapidement pour son travail, et Halimi le nom de son premier époux, nom qu’elle gardera même après son divorce.

Si l’on connait assez bien le parcours professionnel et politique de Gisèle Halimi depuis les années 1980, je connaissais mal son engagement initial dès sa jeunesse et ses grands procès antérieurs, en Algérie notamment, procès de la torture.

Grande défenseure des droits des femmes et de l’avortement, son rôle dans ce domaine passa souvent au second plan derrière le nom de Simone Veil. De même Gisèle Halimi œuvra beaucoup pour la parité en politique.

Cette biographie simple, brève et chronologique n’apprendra sans doute pas grand-chose à ceux qui connaissent déjà bien sa figure politique mais permettra aux autres de s’informer sans prise de tête, le texte étant très accessible, c’est bien le principe de « A la plage », la série qu’on lit « dans un transat ». Une valeur sûre pour ceux qui cherchent une vulgarisation facile mais sérieuse, et qui ne manqueront pas peut-être de se tourner vers d’autres titres. Ça manque un peu de peps (et de critique, le tout se veut plutôt hagiographique), mais ça fait le job.

 

 

Dunod, coll. A la plage, mai 2022, 153 pages, prix : 15,90 €, ISBN : 978-2-10-083887-5

 

 

Crédit photo couverture : © Marie Sourd, Atelier AAAAA / et éd. Dunod

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Le petit astronaute – Jean-Paul Eid

10 Août 2022, 20:36pm

Publié par Laure

Une fois par an à une date anniversaire, Juliette, surnommée Tourniquette, retourne dans le quartier de son enfance, devant la maison où elle a vécu. Cette année, la maison est à vendre et des visites libres sont permises. Elle s’y rend et les souvenirs refont surface…

C’est dans cette maison qu’elle a emménagé à la naissance de son petit frère, né prématurément et victime d’une paralysie cérébrale qui le laissera lourdement handicapé. Avant que les mots ne soient posés et la difficulté à vivre la différence au quotidien exprimée, c’est tout l’amour pour cet enfant qui transparaît et demeure tout au long de l’album.

Le lien est fort entre Juliette et son petit frère, qu’ils surnomment Captain Tom et le chemin est très difficile pour les parents, toutes les portes se ferment au moment de trouver une place en crèche. Toutes sauf une où la bienveillance, la patience et l’attention sincère seront un vrai bonheur.

Bien que cet album soit une fiction, elle est fortement inspirée de l’histoire personnelle de l’auteur, qui en dit quelques mots à la fin.

Un scénario naturellement très touchant, un dessin aux couleurs bien choisies qui colle merveilleusement au texte, on ne peut qu’être ému par cette histoire. Et le prologue qui ouvre le récit prend tout son sens à la fin, une fois la métaphore spatiale mieux comprise.

Une histoire de vie, triste mais belle aussi.

 

 

 

La Pastèque, avril 2021, 148 pages, prix : 26 €, ISBN : 978-2-89777-103-4

 

 

Crédit photo couverture : © Jean-Paul Eid et éd. La Pastèque

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Les chats éraflés – Camille Goudeau

8 Août 2022, 15:08pm

Publié par Laure

Soizic vit chez ses grands-parents sans vraiment connaître l’histoire de son enfance ni pourquoi sa mère, toujours vivante, n’a pas voulu d’elle. Personne n’en parle. Mais les grands-parents sont alcooliques, l’ambiance n’est pas folichonne, il est temps pour elle de prendre son envol et de trouver un job à la capitale. Mais Paris n’est pas l’eldorado que l’on croit quand on n’a pas le sou. Soizic deviendra donc bouquiniste sur les quais de Seine pour son cousin retrouvé là, tout en circulant de plan cul foireux en chambre de bonne miteuse. Le chemin vers l’âge adulte ?

Il n’est point question de chats dans ce roman, n’en déplaise au titre, qui renvoie sans doute à cette jeunesse cabossée qui grandit dans la débrouille sur des piliers fragiles.

On y visite un Paris tantôt touristique tantôt populaire où il se vend plus de tours Eiffel chinoises en plastique que de Proust en édition originale, les unes côtoyant l’autre dans ces grandes boîtes vertes de bord de Seine.

Il y a quelque chose d’attachant dans la plume de Camille Goudeau ; sans être un coup de cœur, c’est un premier roman français qui se lit volontiers, avec un brin de tendresse dans l’œil car Soizic se bat malgré son mal-être, ses troubles alimentaires et son orgueil, et grandir pour elle nécessitera peut-être de mettre de l’eau dans le vin de ses convictions. Le chat lèche ses plaies, à défaut de larmes.

 

Extrait p. 163 : « La marchandise s’épuise. Je vends quelques tours Eiffel, un Yourcenar à 5 euros, NRF. Catherine, rien du tout. C’est dû à la pauvreté des cerveaux, à la pauvreté tout court, à la grande mutilation de l’imaginaire, au dégoût des livres imposés par les profs de français et les parents stupides à leurs enfants. Le livre est compliqué, le livre est ennuyeux, le livre est élitiste, le livre est fait par des intellos méprisants, le livre ne m’aime pas, c’est un objet qui est fait pour ceux qui m’exploitent, le livre es trop difficile à lire, je ne veux pas l’ouvrir, on m’a toujours bien fait comprendre que le livre n’avait pas été écrit pour les gens comme moi. Je suis trop bête pour le livre. Les écrivains sont un amas d’inside jokes destinées à l’élite. Et puis d’abord les livres qu’on m’a obligé à lire à l’école, ils étaient chiants, ils ne me parlaient pas de moi, ils avaient un langage qui fermait la porte au nez du mien. L’élitisme. Qui a tué Jack London ? »

 

Gallimard, la Blanche, avril 2021, 266 pages, prix : 20 €, ISBN : 978-2-07-293001-0

 

 

Crédit photo couverture : © Flore-Aël Surun / Tendance Floue (détail) / et éd. Gallimard

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Le petit frère - Jean-Louis Tripp

3 Août 2022, 06:17am

Publié par Laure

Le petit frère est un récit autobiographique dans lequel l’auteur et illustrateur revient sur le décès de son petit frère Gilles, à l’âge de 11 ans, en août 1976. Il avait alors dix-huit ans, était en vacances en Bretagne avec sa mère divorcée et ses frères, sa copine, son oncle et sa tante. Ils se déplaçaient en hippo-roulottes, c’était chouette comme un beau jour d’été, quand son frère a voulu descendre, et malgré son attention, s’est fait happer par un chauffard qui a pris la fuite, avant d’être retrouvé par les gendarmes.

Ce n’est que plus de 40 ans après que Jean-Louis, qui vit désormais au Canada, revient sur l’événement, en convoquant aussi les souvenirs de sa mère avec qui il échange en visio.

Récit fidèle aux faits, aux sentiments éprouvés à ce moment-là et au moment du jugement, sur l’après. Si l’on ne peut imaginer la douleur des parents quand on ne l’a pas vécue tout en la qualifiant comme la pire, on laisse assez peu de place en général à celle de la fratrie. Chacun a nourri le drame de son propre sentiment de culpabilité mais ce n’est bien après qu’ils ont pu l’exprimer.

Le récit est pudique, très bien mené dans la découpe des cases et des rares pleines pages, dans l’utilisation très limitée de la couleur. Beaucoup de justesse dans cet album émouvant, et un beau travail graphique.

 

 

Casterman, mai 2022, 334 pages, prix : 28 €, ISBN : 978-2-203-22864-1

 

 

Crédit photo couverture : © JL Tripp  et éd. Casterman

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DRH, la machine à broyer : recruter, casser, jeter – Didier Bille

2 Août 2022, 06:49am

Publié par Laure

Ancien DRH, Didier Bille décrit les pratiques abusives et sans vergogne des grandes entreprises dans lesquelles il a œuvré pendant plus de vingt-cinq ans.

Le ton humoristique, voire sarcastique n'en rend pas moins l’ensemble édifiant. De la destruction en bonne et due forme, sans états d’âme. L’humain n’a aucune valeur (quelques indemnités quand il s’agit de s’en débarrasser sous les prétextes les plus fallacieux) face aux profits des grands groupes.

On a beau le savoir, le lire est à vomir. Mais il a bien fini par dire stop et faire autre chose.

Je me suis parfois perdue dans les pseudos tordus et l’échelle alambiquée des managers et des exemples cités, mais ça ne change pas grand-chose au résultat. Intéressant et déprimant. Révoltant serait plus juste.

Et si l’on en croit toutes ces reconversions professionnelles post covid….

 

 

Extraits :

  • P.15 : « Dans « ressources humaines », le terme le plus important est le premier. Le salarié est une ressource, un ingrédient qui a un coût (qu’il faut réduire), un temps d’usage (qu’il faut maximiser, même si cela en diminue la durée de vie), un mode d’utilisation, une date de péremption, qui varie en fonction de la manière dont la ressource a été exploitée, mais qui est toujours respectée (quand c’est plus bon, c’est jeté), et dont l’usage est soumis à une règlementation (qu’il faut s’employer à simplifier ou à contourner). Le second terme, « humaines », c’est juste du camouflage ».

 

  • P. 246 : « Le travail réel est ce qu’un collaborateur va réellement réaliser au quotidien, parfois à l’encontre du travail prescrit. Il développe ainsi sa créativité, son savoir-faire, son autonomie. Il cherche à accroitre sa satisfaction de faire du bon travail, du bel ouvrage, un travail de qualité.

Enfin, le travail ressenti intègre les émotions et l’impact du travail réel sur le psychisme du salarié.

Or, aujourd’hui, en entreprise, seul compte le travail prescrit. Pire encore, seul compte le résultat du travail prescrit. Dans le « moins pire » des cas, le manager connaît le travail prescrit de ses collaborateurs, beaucoup moins leur travail réel et quasiment jamais leur ressenti par rapport à leurs activités. »

 

 

Le Cherche Midi, mars 2018, 270 pages, prix : 18 E, ISBN : 978-2-7491-5805-1 (existe en poche)

 

 

Crédit photo couverture : © éd. Le cherche midi.

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Les cœurs insolents – Ovidie / Audrey Lainé

1 Août 2022, 15:20pm

Publié par Laure

Une BD sociale qui pose un regard de quadra (Ovidie est née en 1980) sur l’évolution des violences sexistes faites aux femmes, des « salopes » de la fin des années 1990 au cyber harcèlement d’aujourd’hui.

Par le biais du lien mère-fille, Ovidie requestionne sa propre adolescence et celle de sa fille à présent adolescente à son tour. Les médias, la vitesse de l’information ont changé, la façon d’en parler également, mais rien n’a vraiment fondamentalement changé.

J’ai trouvé le regard sociologique vraiment intéressant et beaucoup aimé le dessin et choix de couleurs de l’illustratrice Audrey Lainé.

Un conseil : lisez l’excellente préface de Wendy Delorme a posteriori, inutile d’avoir toutes les clés de lecture avant de commencer !

 

 

Marabulles, avril 2021, 126 pages, prix : 17,95 €, ISBN : 978-2-501-13312-8

 

 

Crédit photo couverture : © Audrey Lainé et éd. Marabulles

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Juillet 2022 en couvertures ...

31 Juillet 2022, 22:57pm

Publié par Laure

En juillet, j'ai lu :

(les couvertures sont cliquables quand elles renvoient à un billet)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En juillet, j'ai vu :

 

 

 

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Nous étions dix – Nine Antico

31 Juillet 2022, 09:38am

Publié par Laure

10 personnages dans une grande maison au bord de la mer, qui vont partir à l’aventure de nuit. L’histoire nous est contée par Rosie, l’une d’entre eux.

Rien ne leur fait peur, rien ne les divise. Mais le décompte s’enclenche, comme dans les Dix petits nègres d’Agatha Christie, et au fur et à mesure du retrait des enfants, le courage n’est plus aussi vaillant, la peur n’est plus aussi invincible, jusqu’à la chute, vraiment inattendue et drôle, qui dédramatise l’atmosphère instaurée au fil du texte et de l’illustration.

Le texte est superbement travaillé à la façon d’une comptine rimée, le jeu de la typo en majuscules sur certains groupes de mots scande l’avancée de la peur comme un refrain, en même temps que le compte à rebours qui conduit à « j’étais seule ».

Très réussi, cet album se relit inlassablement.

 

A partir de 5 / 6 ans.

 

 

Albin Michel Jeunesse, coll. TrapèZe, janvier 2018, 48 pages, prix : 18 €, ISBN : 978-2-226-40156-4

 

 

Crédit photo couverture : © Nine Antico et éd. Albin Michel Jeunesse

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