Les jardins d'Hélène

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Les ensoleillés - Joël Egloff

4 Décembre 2006, 22:09pm

Publié par Laure

Joël Egloff, je l’ai découvert avec l’Etourdissement, prix Inter 2005 que j’avais beaucoup aimé. Je poursuis aujourd’hui avec les Ensoleillés, roman plus ancien, que pour ma part je considère comme un recueil de nouvelles, qui ont toutes pour point commun l’éclipse totale de soleil du 11 août 1999. Ce petit livre, publié en 2000, m’a surprise, étonnée, et… réjouie !

A travers des tranches de vie cyniques, drôles, cocasses, particulières, l’auteur dresse des portraits attachants et intéressants d’enfants, de jeunes, de vieux, de couples, de célibataires, qui tous ce jour-là se sont donné pour but d’aller voir l’éclipse. Certains y arriveront, d’autres non, volontairement ou non. Il y a ce jeune homme un peu bordélique qui ne fait pas sa vaisselle depuis des lustres et qui dans sa liste des tâches du jour, inscrit d’abord : défaire le sapin de Noël (je vous rappelle qu’on est en août, quand même !). D’ailleurs, c’est pour cela que sa copine l’a quitté : elle lui avait donné pour ultimatum « si tu n’as pas défait le sapin à Pâques, je me barre », et elle est partie. Il y a cette assistante qui a donné rendez-vous à ses enfants - un peu jeunes encore pour prendre le métro seuls mais allez, elle a pris le risque - juste quelques minutes avant l’événement mais que son patron retient au bureau au dernier moment, et l’auteur de nous proposer trois fins possibles au contretemps… (excellent !!!) Il y a cette famille en vacances en bord de mer qui passe une semaine pourrie sous la flotte mais le père écrit la carte postale hypocrite parfaite, … et s’engueule avec sa femme. La petite vieille qui ne doit plus sortir de chez elle mais qui brave les bien pensants pour aller voir l’éclipse : trop faible pour lever la tête, elle ne verra que la pénombre à ses pieds. Il y a l’agriculteur qui construit son vaisseau spatial alimenté à la betterave pour échapper à l’Apocalypse en décollant la veille du jour J, etc. etc. etc.

Les nouvelles sont nombreuses, variées, pour certaines très courtes, et toutes ou presque m’ont ravie. Je maintiens le terme de « nouvelle », car il y a chaque fois ces caractéristiques d’entités autonomes et de chutes inattendues. Il y a quelques chose de spécial dans l’écriture d’Egloff, le bon mot à la bonne place, la ciselure parfaite, et si ce quelque chose, ça s’appelait tout simplement le talent ?

Ed. du Rocher, juin 2000, 157 pages, ISBN 2-268-03749-5, prix : 13,57 €

Existe en poche

Ma note : 4,5/5

 

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Corpus Christine - Max Monnehay

28 Novembre 2006, 10:59am

Publié par Laure

Prix du Premier Roman 2006

D’abord, la genèse de ma lecture : j’avais sélectionné ce livre dès le mois de juillet pour mes achats de rentrée littéraire, tant les critiques le sortaient du lot. Mais comme à chaque vague d’achats, je m’empresse de les mettre à disposition des lecteurs, et ne les lis souvent que bien plus tard ! (Littell ayant 4 ou 5 réservations, je ne suis pas près de mettre la main dessus). Mercredi dernier, une bénévole rapporte ce livre et nous fait part de son désarroi : elle a été complètement déstabilisée, n’a pas compris où l’auteur voulait en venir, s’est perdue dans le mélange des temps – les retours en arrière, les anticipations – et semble très déçue par sa lecture. Déçue mais curieuse : en tout cas elle nous en parle avec tant de questionnement que l’on a immédiatement envie de le lire, tout en admettant que son résumé ne fait pas envie ! (bon j’sais pas si vous suivez !). Du coup, bien que croulant déjà sous les piles, je l’embarque chez moi.

 

Qu’en est-il de ce corpus Christine ? L’auteur, sous pseudo masculin, est une toute jeune et jolie femme de 25 ans, et il s’agit-là de son premier roman. Le narrateur est un homme, marié, qui se trouve séquestré par sa femme, et vit allongé par terre, et il ne peut se déplacer qu’en rampant. Quelle haine peut bien habiter sa femme pour qu’elle le laisse croupir ainsi sans le nourrir ? Car plus elle devient obèse, plus elle affame son mari. Pourquoi ? J’avoue que le premier tiers du roman est excellent, j’ai beaucoup aimé cette histoire intrigante et dérangeante, hors du commun, espérant trouver au fil des pages des réponses à toutes les questions soulevées. Puis vers le milieu du livre, on s’enlise dans un récit ennuyeux et répétitif. Qui n’apporte pas grand-chose à l’histoire. Long et répétitif. La fin à nouveau est très bonne, et j’attends d’en discuter avec d’autres lecteurs, pour voir si j’ai bien compris la même chose qu’eux… Bref, sans ces 70 pages du milieu, on aurait eu un roman original et dérangeant, un coup de poing dans le paysage littéraire, mais au final on a un roman qui me laisse perplexe, inégal et déséquilibré. On a pu lire ici ou là que l’écriture de Max Monnehay tenait de Stephen King et d’Amélie Nothomb : je ne sais pas pour Stephen King (jamais lu !), ça y ressemble pour Amélie Nothomb si l’on retient les situations complètement tordues et le rapport au corps. Dans le dernier et tout neuf magazine des Livres, dans une interview, Max Monnehay se reconnaît un maître en littérature : Chuck Palahniuk. On y croit sans peine.

Albin Michel, août 2006, 226 p. ISBN 2-226-17334-X, prix : 15 €

 

Ma note : 2/5

 

 

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Présent ? - Jeanne Bénameur

27 Octobre 2006, 17:10pm

Publié par Laure

Pour commencer, merci, merci, merci ! monsieur JPB  (JPB n’ayant pas de blog, je mets un lien vers son dernier roman). Vous nous invitiez nous les blogueuses à lire d’urgence ce livre, et je l’avoue, sans votre enthousiasme à le défendre, je ne l’aurais pas lu. Encore un roman sur l’Education Nationale qui va mal, mouais [gros soupir], c’est pas en les démultipliant qu’on va régler le problème. Et puis je me suis laissée emporter par les mots, les phrases simples et si belles de Jeanne Benameur, qui enveloppent le lecteur d’une grande douceur, là, dans ce décor de collège de banlieue parisienne ni pire ni meilleur qu’un autre alentour. 

Ce roman, c’est du baume au cœur pour l’hiver et pour toutes les saisons, c’est une foi en l’homme (l’humain, qu’il soit élève ou prof) et en l’école inouïe. Débordant d’empathie quand il nous fait vivre les émotions des uns et des autres, de la petite prof de SVT qui bat des records d’absentéisme parce qu’elle est loin de son amoureux, de sa Bretagne et de la mer, et qui n’arrive plus à affronter les élèves, de D., l’élève qu’on dit violent mais qui reprend confiance en lui et se découvre dans l’atelier d’écriture de la documentaliste, Madison l’élève qu’on condamne d’avance parce qu’elle n’entre pas dans les cases des notes alors qu’elle est talentueuse en dessin, bref, profs, élèves, conseillers d’orientation, ATOS (les personnels de service), tous ont ce fond d’humanité qu’il est beau de percer, et ce livre y réussit merveilleusement. Bien sûr il y a quelques c*** (biiiip) aigris qui le resteront, ressassant leur fiel,  mais au final de ce conseil de classe de 3ème à la fois drôle et dramatiquement tendu, on ressort avec une croyance inébranlable en l’école et tous ceux qui la font. 

Alors bien sûr… c’est un roman. Une fiction optimiste et passionnée. Mais on a farouchement envie d’y croire ! Parce qu’il y en a encore, des profs ou des personnels qui y croient, qui continuent d’aimer leur métier et d’y mettre toute leur énergie, alors on se doit d’y croire avec eux.  

Eva, si tu me lis, ce livre est pour toi. En tout cas j’ai pensé à toi tout au long de ma lecture ! Comme la prof de SVT qui à la fin…(chut…)

L'avis de Florinette : ici

 

Et les mystères de l'édition : tout l'été ce roman nous était annoncé dans les magazines professionnels sous le titre : les alphabets ne dorment pas. Un changement de titre est toujours une intrigue. Après lecture, je préfère le titre retenu : présent ? pour le rituel de l'appel au début de chaque cours, et pour l'actualité qu'il traduit.

Denoël, août 2006, 209 p. ISBN 2-207-25885-8, prix : 16 € 

Ma note : 5/5  

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2 femmes 2 hommes 4 névroses - Martina Chyba

15 Octobre 2006, 14:53pm

Publié par Laure

Martina Chyba, d’origine tchèque, vit et travaille en Suisse, où elle est journaliste. 2 femmes 2 hommes 4 névroses est son premier roman, qui m’apparaissait fort tentant au vu des résumés et critiques de presse que je vous livre ci-après :

 

Le début de la quatrième de couv : 

Aujourd’hui, on ne dispose que de 15 ans pour réussir sa vie. Entre 25 et 40 ans il faut du fric, du cul, des gosses, une carrière, du fitness, des voyages, des soirées échangistes, trouver un sens à sa vie, du shopping à new York, etc.  

Si vous êtes tout en bas de l’échelle de Richter de l’épanouissement personnel et de la reconnaissance sociale, il faut vous reprendre. C’est exactement ce que tentent de faire deux femmes et deux hommes. 

Premier roman et pari réussi pour ce livre hilarant, dont l’objectif est de décrire les errances névrosées d’une génération désespérément privilégiée sur le monde de la comédie grinçante.

 Quelques critiques des médias suisses romands

Migros Magazine  4 septembre 2006 

 « Un premier roman zinzin et névrosé »  

« Un ovni total, un objet virtuellement littéraire à l’écriture vive, explosée, sonore »   

 

« Drôle de chez drôle »

 Le Matin  9 septembre 2006  

 

« L’auteur manie la plume avec salacité pour évoquer les obsessions et autres états d’âme de ses personnages »  

 

« Un exercice de style un rien potache, un soupçon Almanach Vermot remastérisé »

  « Très moderne »

   Le Matin Dimanche  10 septembre 2006  

 

 « Fiction déjantée et enlevée, truffée de calembours et de plaisanteries »  

 

Coopération  12 septembre 2006

 « Acidulé comme un bonbon »  

 

« Le premier roman de Martina Chyba fait (très) fort »

 24 Heures  23 septembre 2006  

 

« Une première fiction délurée »  

 

« Un collage de textes hybrides à l’humour potache »

Cette lecture fut éprouvante pour moi. Car si je suis d’accord avec la plupart des critiques citées plus haut, je crois identifier ma difficulté : je n’arrive pas à lire ce livre comme un roman. D’abord, dans sa présentation graphique tout simplement : des paragraphes de 3 à 4 lignes, rarement plus ; beaucoup de sauts de lignes, des tableaux, de l’italique pour les propos ou pensées des personnages, du caractère normal pour les passages narratifs. Cette présentation conduit à une lecture hachée qui ne permet pas l’unité romanesque. De par le fond ensuite, il s’agit pour moi d’une juxtaposition de bons mots, de propos délirants, virulents, chaque phrase est une vanne qui me fait penser à Laurent Ruquier, et j’ai plutôt l’impression de lire un recueil de pensées déchaînées, de calembours, et de ce point de vue là, l’auteur a fait très fort ! Car se renouveler sur chaque phrase, ça ne doit pas être évident !

Je vous livre en vrac, quelques passages, notés au moment où j’avais un carnet à côté de moi, mais j’aurais tout aussi bien pu relever d’autres paragraphes, tout est de cet acabit : 

 

p.74 : « Violette entra finalement dans un magasin chic et cheap et n’éprouva pas la bouffée compulsive qu’elle ressentait d’habitude. Pour une jeune femme bien sous tous rapports (y compris sexuels), pénétrer dans un magasin, c’est déjà un orgasme.

Et ressortir sans avoir rien acheté, c’est un coïtus interromptus.

Violette s’offrit un survêtement neutre ce qui pour un survêtement suisse est une qualité non négligeable. » 

 

p. 78 : « les femmes qui portent la culotte sont toujours épanouies à l’étage des slips. » 

 

p.80 : « N’importe quel gamin de l’école élémentaire (mon cher Watson) pouvait le faire, mais les seniors/es avaient du mal » [Il s’agit d’acheter un ticket de bus à une borne automatique] 

 

p.84 : « Je n’ai pas de boulot en vue à part entamer un brillant master en histoire de l’art pour compléter ma licence es lettres. Et accessoirement (j’adore les accessoires) dépenser ce qu’il y a sur la Gold, ce qui contrairement à mon milieu n’est pas aisé, parce que la carte de crédit, c’est comme une flûte de champagne pendant un cocktail : il y a toujours quelqu’un qui la remplit sans qu’on s’en aperçoive ». [Elle a bien de la chance parce que ma carte de crédit, personne ne me la remplit, à moi !]

p. 85 : « Jean opina (pardon c’est comme ça qu’on dit mais on peut proposer une version moins sexuée). Donc : Jean donna son assentiment. » 

 

p.86 : « le déformaticien est de moins en moins net. 

Ben oui, c’est moi. 

Celui qui s’appelle Mac et qui n’a plus le droit de coucher avec son PC.

Mais qui doit trouver une femme bien (payée). »

 

 p. 90 : « Même s’il ne jure que par la bourse, il n’a pas de couilles » 

 

p.93 : Inutile de préciser que l’entretien d’évaluation de Jean se passa :

a – de manière catastrophique

b – de commentaires

[…] D’abord pour être performant, il faut être mince. Sinon vous risquez gros. » 

 

p.111 : « A la Saint-Valentin, si elle te caresse la main, réjouis-toi de la sainte Marguerite… » 

 

p. 156 : « le virtuel, c’est comme l’ordinaire : c’est bien à condition d’en sortir. D’ailleurs n’importe quel pékin (la Chine est à la mode dans le monde global et blogal) qui tient son blog rêve d’être édité par une grande maison parisienne et de voir son livre entre les rayons charcuterie et papeterie d’un supermarché. N’importe quel clampin qui fait de la télé sur internet rêve d’être diffusé sur une grande chaîne du canal hertzien entre deux blocs de publicité.

Alors parfois, on devrait savoir la mettre en veille (euse) avec nos nouvelles technologies et se les carrer quelque part. »

J’arrête là mes citations, pour vous parler de l’histoire. C’est là que le bât blesse. Cette avalanche de bons mots (qui n’a rien de surprenant quand on lit au dos que l’auteur est chroniqueuse à la Télévision Suisse Romande) étouffe dans l’œuf l’unité narrative. Je suis incapable de vous faire un résumé de l’intrigue. A chaque reprise du bouquin, j’avais oublié qui était qui, qui couchait avec qui, et où il en était de son projet de TCCC (thérapie cognitive comportementale entre copains). En gros il s’agit de Very Important Petasses (et leur pendant au masculin) qui ont des soucis de gosses de riches. Heureusement il y a des parties bien définies : Problèmes, Solutions simples, Solutions compliquées, Problèmes résolus, Epilogue. Pour les 4 personnages, il y a Armand Maunoir, 35 ans, ex-banquier, homme de TV, qui doit se faire épiler les couilles pour essayer de bander à nouveau (passionnant programme). Il y a Violette G. Edelweiss, clonasse belle et rebelle (et pas débile). Son problème : euh, ben ch’ais plus ! (quand je vous dis que j’ai eu du mal !). Puis vient Jean Mac Arthur, déformaticien divorcé point net. Vous plantez pas, il bosse sur PC. Et pour finir, Marguerite Richard-Conne, ménagère manager cuculpabilisée. Elle non plus je ne sais absolument plus quel était son problème.

Alors roman, non. Ovni, oui. Critique de notre société de consommation moderne à la dérive, assurément, mais à quel degré ? Je ne trouve pas la distance. Une fois encore l’écriture adoptée noie l’ambition romanesque : on n’en retient que l’humour quasi toujours en dessous de la ceinture et les jeux de mots multiples qui à la longue sont franchement usants.

Et la blogueuse que je suis sur mon temps de loisir n’a aucune, mais absolument aucune, prétention à être éditée dans une maison parisienne cf citation de la page 156. Lectrice je suis, et lectrice je resterai. 

 

 

Ed. Favre, août 2006, 225 p. ISBN 2-8289-0921-2, prix : 17 €

www.editionsfavre.com

 

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La promesse d'Oslo - Gilles Rozier

10 Octobre 2006, 16:11pm

Publié par Laure

Sharon, 42 ans, vit à Jérusalem, où elle est cuisinière dans une maison de retraite. Elle a un fils de 20 ans, Eli, qui meurt dans un attentat. Comment survivre à cette absence ? Sharon est divorcée aussi, car dans la tradition juive, on se doit d’avoir plusieurs enfants (« la Loi dit Croissez et multipliez »). Comme elle n’a jamais donné la vie après Eli, son mari est allé voir ailleurs. Sharon va déménager, quitter son quartier ultra orthodoxe pour un autre petit appartement, dans un immeuble où elle va sympathiser avec sa nouvelle voisine, Magda. 

Je me suis longtemps demandé où l’auteur voulait en venir… Il nous fait tout simplement partager le quotidien d’une femme juive qui vit sa religion dans le respect le plus strict des lois, et qui rencontre des personnages qui eux s’accordent des libertés avec celles-ci ! Il y a de l’humour, et on s’attache assez vite à ce personnage de femme qu’on sent à la fois « corsetée » par sa religion, mais satisfaite tout de même de ce « cadre ». Et puis quand sa voisine Magda, la quarantaine aussi, donne naissance à un petit garçon grâce à la fécondation in vitro, pourquoi n’essaierait-elle pas, elle aussi, de donner une nouvelle fois la vie ? Pas pour remplacer Eli, non, mais pour prolonger son existence justement, en parlant de lui à une fratrie. Mais voilà, pour respecter les lois de la Torah, seule la procréation avec donneur anonyme non juif est possible (si le père est juif, il faut qu’il y ait mariage, et Sharon ne veut pas de mariage !). Sur le conseil de son rabbin, ce sera Oslo, où le nombre de juifs est très faible, donc le risque que le donneur soit juif quasi nulle. Elle s’invente une vieille tante en Norvège pour s’absenter une semaine. Le temps aussi de réaliser que son pays lui manque, sa voisine et son collègue de travail aussi. Plus on avance dans le livre et plus on aime cette femme qui se débat entre ses envies et le respect des Lois. Aussi la fin qui se veut d’une grande simplicité (c’était pas si compliqué de faire quelques arrangements !) est un bonheur simple, pour le lecteur et pour le personnage de Sharon. 

J’ai aimé découvrir ces traditions juives que je ne connaissais pas, mais aussi l’ouverture d’un peuple dans sa façon de vivre sa religion, ainsi que le cadre du conflit israélo-palestinien, même si chez Rozier on apprend moins que chez Zenatti de ce point de vue-là. C’est un roman prenant et attachant sur la façon de vivre sa judaïté, une réflexion personnelle sur l’amour, le couple, la maternité et le risque dans un pays en conflit permanent, où prendre le bus peut vous faire perdre la vie à tout instant. La fin aborde aussi l’homosexualité de façon très sereine et détachée, comme une évidence que l’on ne lit pas si souvent !

Denoël, août 2005, 186 p., ISBN 2-207-25702-9, prix : 15 € 

Ma note : 3,5/5

 

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Puisque rien ne dure - Laurence Tardieu

9 Octobre 2006, 13:51pm

Publié par Laure

En janvier 1990, une petite fille de 8 ans, Clara, disparaît sur le chemin du retour de l’école. Ses parents, Vincent et Geneviève, sont effondrés, bien sûr. Le temps passe et l’on ne retrouvera pas l’enfant. A chacun sa façon de réagir, de se replier sur soi ou d’avoir besoin d’écrire pour survivre, le couple s’éloigne et se sépare. Quinze ans plus tard, Vincent reçoit une courte lettre de Geneviève. Malade, elle l’appelle à son chevet pour lui parler une dernière fois. Aussi longtemps que dure le trajet en voiture, Vincent se bat contre ses souvenirs qu’il ne veut pas faire ressurgir, et puis dans la maison de la femme qu’il a aimée, ils se retrouvent, parlent de leur fillette à jamais perdue.

D’une grande tristesse certes, ce roman est pourtant d’une grande douceur, d’une grande pureté, d’une grande beauté. Des phrases simples qui composent comme une délicate mélodie apaisante, un dernier souffle d’amour avant la mort. Chacun réussit à trouver la paix dans ces derniers moments. C’est beau, tout simplement.

Stock, août 2006, 127 p., ISBN 2-234-05927-5, prix : 13 €

Ma note : 4,5/5

 

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Journal d'Hirondelle - Amélie Nothomb

3 Octobre 2006, 08:50am

Publié par Laure

Ne revenons pas sur le rapport texte / espace dans la page, ni sur les 136 pages lues en 1h30 pour 14,50 € -  quand même. Cela a été dit et redit. Alors Nothomb 2006, bon cru ou mauvais cru ? Je dirais que ses histoires sont de plus en plus éloignées de mon monde, souvent proches de l’absurde, en tout cas pas réalistes, et ça j’aime pas. Non pas que ce journal d’Hirondelle soit mauvais, mais il est loin de moi, il me semble inachevé, malgré une fin « fermée », elle arrive de façon trop rapide. Ceci dit toute la deuxième moitié du roman, lorsque le comportement du héros (qui s’est choisi Urbain pour prénom) change ne m’a pas intéressée. Je suis allée au bout parce que c’est vite lu. Mais bof, moyen, quoi. Et puis cette version 2006, je la trouve limite vulgaire. En effet, Urbain, après avoir perdu toutes sensations, devient tueur à gages. Il fait suivre chaque meurtre d’une « séquence onaniste » (je cite). Cette jouissance déplacée (et répétitivement décrite) et cette pub non stop (une page sur deux) pour les CD de Radiohead m’ont agacée.

 

Amélie me lasse. Pourtant je la lis. Espérant chaque année trouver une petite pépite. En vain ces dernières années. Mais je l’emprunte à la bibliothèque. Pas question de risquer 15 € pour 136 pages vite oubliées. Et puis Albin Michel a certainement les moyens de se payer des correcteurs, alors les coquilles sur 130 pages, ça suffit. Chaque année je les souligne, ça ne change jamais. Dans celui-ci encore une phrase où il manque un mot, une relative sans son pronom. Ça fait désordre.

L'avis plus conciliant d'Anne : ici

Albin Michel, août 2006, 136 p. ISBN 2-226-17335-8, prix : 14,50 €

 

Ma note : 2/5

 

 

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Elle s'appelait Sarah - Tatiana de Rosnay

2 Octobre 2006, 10:51am

Publié par Laure

Ce dernier roman de Tatiana de Rosnay est un concentré d’émotions, un roman magnifique malgré toute l’horreur du sujet, bref mon dernier coup de cœur de lecture.

L’histoire commence à Paris en juillet 1942. La petite Sarah, 10 ans, enferme son petit frère dans un placard au moment où la police française vient les chercher, sa mère et elle. Elle a terriblement peur, ne sait pas ce qui se passe, mais ça ne doit pas être bien grave puisque c’est la police française… elle le croit en sécurité et lui promet de revenir très vite. Hélas, comme beaucoup d’autres familles ce 16 juillet 1942, c’est l’enfermement inhumain au Vélodrome d’Hiver, avant le départ vers les camps. En parallèle, il y a l’histoire de Julia Jarmond, américaine qui a épousé un français et vit à Paris de longue date. Elle est journaliste et son chef lui donne un papier à écrire sur le 60ème anniversaire de la Rafle du Vel d’hiv. Bien sûr les deux histoires vont se rejoindre.

Tatiana a l’art de faire monter la tension pour scotcher son lecteur aux pages : impossible de s’arrêter, car on veut savoir la suite ! J’ai presque été tentée de lire les chapitres en alternance pour vite connaître l’issue de l’histoire de Sarah, et puis non, j’ai joué le jeu et suivi la narration choisie par l’auteur, mais j’avoue : elle a joué avec mes nerfs !

C’est un roman courageux, aussi. Sur l’Histoire, bien sûr, car même si ce n’est pas un roman historique, l’auteur revient avec brio sur ces faits noirs de la France. Difficile de rester insensible face à l’horreur décrite, et obligation de féliciter l’auteur pour ce remarquable devoir de mémoire. Un roman courageux aussi sur la crise du couple de Julia, car là non plus, l’auteur n’a pas choisi une fin mielleuse où l’on pourrait croire que tout est bien qui finit bien. Pourtant ce n’est pas un roman triste : j’y ai ressenti de l’espoir, une grande foi en la vie, et coûte que coûte, les personnages vont au bout de ce en quoi ils croient. C’est un beau roman, fort, très fort, et longtemps riche en rebondissements. (chut, je l’ai fini les larmes aux yeux…)

A noter : Tatiana a écrit ce roman dans sa langue maternelle, c’est-à-dire en anglais, alors qu’elle a toujours écrit jusqu’à présent directement en français. J’en ai été très surprise lorsque j’ai découvert la mention de traduction en page de titre. Je ne connais pas la version originale mais la traduction d’Agnès Michaux est parfaite, puisque dans cette langue-là, j’ai aimé le roman ! Tatiana s’en explique sur le blog de Majanissa : voir ici. Pour ma part, aucun des passages qui se voudrait critique sur la réputation des Français ou des Américains ne m’a choquée, j’y adhérais même totalement, ils ne m’ont pas marquée non plus, je me suis beaucoup plus attachée aux émotions du récit, tant sur l’histoire de Sarah que sur celle de Julia.

Un coup de coeur !

France Loisirs (avant-première), août 2006, 443 p. ISBN 2-7441-9420-4

Paraîtra aux éditions Héloïse d’Ormesson au printemps 2007.

Ma note : 5/5

 

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Chaud-froid - Yumiko Seki

24 Septembre 2006, 16:31pm

Publié par Laure

C’est un petit roman tout simple que ce chaud-froid, à moins que ce ne soit plutôt un récit autobiographique, en tout cas ça se lit tout seul et c’est bien sympathique. 1er roman de la japonaise Yumiko Seki, il a été écrit directement en français, mais l’auteur vit à Paris depuis 1982.

Par chapitres intercalés, la jeune Yuka revient sur son enfance dans le Tokyo des années 60-70, où elle vit avec ses parents, selon un modèle social et culturel qui lui paraît étriqué, et le Paris de l’année scolaire 1979-1980 où elle arrive pour une année universitaire. Adolescente, ses rêves de liberté et d’éveil sexuel se trouvent vite étouffés dans la rigueur froide de l’Orient. Différente dans sa façon de penser et d’agir, elle sombrera dans une triste anorexie après avoir perdu la plupart de ses amis. L’Occident l’attire, mais pas le gigantisme des Etats-Unis, non, elle se sent attirée par la France qu’elle imagine impertinente. Si elle s’y laisse facilement aborder par les hommes, elle est souvent déçue : ils ne voient en elle que l’exotisme japonais, et ne savent pas lui faire partager cette culture occidentale qui la motive tant. Flirts, premier amour, regard étranger sur Paris, c’est aussi la construction alternant les souvenirs japonais au présent parisien qui est intéressante. On resterait volontiers plus longtemps avec Yuka, même si au final, on devine bien quel sera son choix. J’ai aimé la simplicité et la légèreté de ce roman, même si je l’aurais souhaité plus touffu, rester davantage avec le personnage, en apprendre plus encore sur le Japon…

Et la difficulté à rester vivre sur un territoire « étranger », toutes ces questions de visa et d’autorisation de séjour m’ont fait penser… à Lou ;-)) Pas facile la vie !

JC Lattès, fév.2005, 249 p. ISBN 2-7096-2590-3, prix : 14,50 €

Ma note : 4/5

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Les autres - Alice Ferney

21 Septembre 2006, 13:30pm

Publié par Laure

Et bien voilà qui va sans doute être une grande première dans notre petit monde des blogs de lecture : non je n’ai pas aimé le dernier roman d’Alice Ferney. Déjà je n’avais pas réussi à lire son précédent Dans la guerre et l’avais vite abandonné. Alléchée par toutes les bonnes critiques autour des Autres, je me suis empressée de l’entamer, pour assez vite avoir envie de le laisser tomber. Je l’ai interrompu par une autre lecture. Je l’ai repris, et véritablement, je me suis forcée à le finir. Si dans sa construction il est original et dans son style toujours bien écrit (c’est Ferney quand même ! Celle que je défends becs et ongles pour ce que je considère comme un des plus beaux romans d’amour du XXIème siècle : la conversation amoureuse), je trouve les Autres trop long, beaucoup trop long, et surtout redondant. Certes ce sont ces trois parties, choses pensées, choses dites, et choses rapportées qui le veulent, mais je trouve la dernière partie vraiment de trop. D’ailleurs, tous les secrets de famille ou presque sont déjà dévoilés dès la première partie, alors qu’apporte les deux dernières hormis le jeu stylistique ? Je m’y suis ennuyée. 

 

D’une façon plus générale – une autre blogueuse en avait déjà parlé – comment aborder avec plaisir un livre aujourd’hui quand on a déjà tout lu sur lui, critiques professionnelles écrites, de radios ou de télé, émissions de promo, et tournée des blogs ? J’ai eu cet effet-là avec les autres : tout était dit déjà, dans les résumés, tout était attirant : un frère aîné offre à son cadet un jeu de société qui annonce une soirée délicate entre amis où les susceptibles sont priés de s’abstenir : comment se voit-on, comment les autres vous voient-ils et comment imagine-t-on que les autres vous voient ? Le soufflé était déjà retombé car il n’y a rien d’extraordinaire dans les secrets même ou les perceptions qui seront révélés, rien d’extraordinaire alors fallait-il vraiment les répéter de trois façons différentes ? 

 

Je n’ai trouvé jusqu’à présent qu’un seul avis d’internaute anonyme sur le site de la FNAC qui soit déçu par ce livre. Annoncé comme un roman intimiste de la même veine que la conversation amoureuse, je ne suis pas du tout d’accord ! Vous remarquerez d’ailleurs que les lecteurs qui aiment Ferney souvent n’ont pas aimé la conversation, et qu’à l’inverse, pour les admirateurs de la conversation amoureuse, elle restera l’auteur de ce seul livre. Je fais partie de ceux-là !

Actes Sud, coll. « Un endroit où aller », août 2006, 531 p. ISBN 2-7427-6258-2, prix : 21,80 €

 

Ma note : 2,5/5

 

 

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